Hugo Duminil-Copin est un phénomène. Ce garçon est une bête des cheminements aléatoires, un cador de l’équation, un monstre de la probabilité. Il vient de recevoir la médaille Fields, la plus haute distinction de la discipline, l’équivalent d’un prix Nobel. Un Français, un de plus, est donc considéré comme une pointure des mathématiques ! C’est le 12e tricolore, depuis 1936, à recevoir la breloque, et les honneurs qui vont avec. Bilan plus que satisfaisant quand on sait que le jury, le congrès international des mathématiciens, ne se réunit que tous les 4 ans…
Une médaille Fields, une de plus, pour le système éducatif hexagonal. Une médaille, une de plus, pour les instits qui n’en ont pas fait une bête de foire. Une médaille, une de plus, pour les profs qui ne l’ont pas cantonné à un programme figé d’un ministère qui l’est tout autant. Une médaille, une de plus, pour l’Éducation Nationale. Ce n’est pas grâce à tous ses fossoyeurs locataires successifs de l’hôtel de Rochechouart. Cependant, ce pourrait être la dernière si on prend en compte que, en maths, 1035 postes de profs étaient proposés en 2022, que seuls 816 candidats étaient admissibles et que, avant les oraux, ce nombre chutera de 200 unités. Pas impossible au regard des modes de recrutement de Pôle emploi pour les prochains professeurs de l’académie de Versailles : le job dating. Il n’existe rien de mieux pour avoir des profs au rabais, intermittents de l’Éducation Nationale. On devrait appliquer la méthode pour les nouveaux toubibs puisqu’on en manque aussi. Sans vraie formation spécifique, sans vrai diplôme inhérent, sans vraie connaissance du métier si ce n’est d’en avoir envie, ces nouveaux précaires du monde du travail vont avoir la lourde charge d’instruire nos chères têtes blondes – les roux, châtains, crépus, ou frisés ne sont pas exclus – qui sont les remplaçants de demain des boomers de maintenant. Si on ajoute que les parents d’élèves confondent généralement instruction et éducation, associé à la perte de confiance aux différents échelons de la hiérarchie, on comprend que le malaise soit perceptible et que le recrutement soit si difficile.
Hugo Duminil-Copin est un phénomène mais n’est qu’un beau, joli, efficace, arbre qui masque la forêt d’imbéciles ou de génies – ce sont les mêmes- seulement connus par leurs familles. Les sectes, toutes les sectes, savent que l’obscurantisme est terreau favorable. Les religions, toutes les religions, se sont depuis longtemps emparées de ce problème qui perturbe tant la bonne marche des affaires des Dieux, et surtout de ceux qui en vivent ! Les dictatures, toutes les dictatures, du peuple comme les autres, se sont depuis longtemps emparées de ce problème qui perturbe tant la bonne marche des affaires des guides suprêmes, de Droite comme de Gauche.
L’instruction est une arme. C’est une arme lourde, utilisable en combat rapproché comme à distance. Une arme beaucoup trop forte pour être laissée en libre accès à tous. La perte des savoirs est une aubaine pour les mous du bulbe, les durs de la comprenette, les secs de l’intelligence et les gonflés de la suffisance. Trop d’instruction et la place laissée aux « Sachants » des réseaux sociaux, incontinents de l’idée radicale, ces Tonton Albert du Café du Commerce et des Trois magots réunis, serait tellement moindre. L’instruction est un pan de la démocratie et des valeurs républicaines.
On devrait demander aux Marseillais au Mexique, ceux avec les beaux tatouages partout, celles avec bonnets C et cerveaux petit a, ce qu’ils en pensent. Peut-être des surprises, nous aurions petit padawan…
Fabrice Simoes