Les PME se plaignent quant à elles de difficultés pour obtenir de la trésorerie ou pour financer leur développement. Les chefs d’entreprise français sont souvent pudiques sur les questions d’argent et rares sont les patrons susceptibles d’expliquer leurs relations avec les banques devant la presse. François Tissiot, patron d’une des plus anciennes entreprises du Cher souhaite quant à lui s’exprimer sur cette question. Il se plaint de son banquier.
Un dossier sur un désaccord entre un client et son banquier n’est pas facile à traiter car si le client a envie de parler, la banque ne le peut pas au nom du secret bancaire. Nous avons tenté de contacter la Société Générale, la banque de François Tessiot. La direction locale n’a pas souhaité répondre à nos questions, mais l’attachée de presse du siège nous a clairement expliqué que parler publiquement du dossier d’un client, c’est violer le secret bancaire. Pas facile pour le journaliste de construire son dossier que sur un seul point de vue, mais la banque ne pourra s’exprimer que dans le cadre d’un « droit de réponse ». Précisons d’emblée que si elle le souhaite nos colonnes lui seront ouvertes.
L’entreprise Tessiot n’est pas nouvelle dans le paysage berruyer. Elle a été crée en 1869 par l’arrière grand-oncle de François Tessiot. Les immeubles qui abritent l’entreprise près de l’Enclos des Bénédictins ont été acquis en 1880. La société est le plus vieil adhérent de la Chambre Syndicale des déménageurs de France et l’un des plus vieux adhérents de la Chambre de commerce du Cher. « Tessiot, c’est 3 guerres et 5 notaires ! » explique le dirigeant.
Le problème de l’entreprise c’est que suite à des difficultés, elle connaît un redressement et une inscription au privilège de prêteur de deniers. « Tant qu’on est dans le remboursement des dettes, on ne peut plus changer de banque, même si notre situation économique s’est améliorée. Aucune autre banque ne nous prendra comme client et le jeu de la concurrence est faussé » explique Anne Tessiot, la fille du dirigeant et responsable financière. « L’entreprise est désormais économiquement à l’équilibre, mais en 6 ans, les relations avec notre banque nous on coûté 273 000 € de frais bancaires ! La banque refuse de nous accorder des moyens termes et même des courts termes. Nous sommes obligés de financer nos besoins en trésorerie uniquement avec le découvert. Or le découvert coûte très très cher en frais financiers. Si vous ajoutez à cela que la banque crédite les chèques que nous faisons dans la journée et peut mettre plusieurs jours pour créditer les chèques que nous remettons… on peut vite se retrouver en détresse pour les dates d’échéance de l’URSAFF et de la TVA » explique Anne Tessiot. Son père ajoute « La relation de confiance est rompue, il y a des tracasseries difficilement acceptables ; la banque nous refuse un chèque pour signature non conforme. La cliente était une personne âgée et effectivement sa signature était altérée par rapport à son ouverture de compte il y a plus de 20 ans. La banque a bloqué le chèque de 1200 €… puis elle l’a égaré. Elle me demande de me retourner vers la cliente. Or celle-ci est désormais sous tutelle et la tutelle me dit que le chèque est encaissé ! En tout cas, il n’est pas crédité sur mon compte ».
Anne Tessiot précise « Nous n’arrivons pas changer de banque, mais nous avons trouvé une autre relation avec une autre banque. En 1942, l’entreprise avait du ouvrir un compte à la Banque Postale de Limoges pour les prestations qu’elle réalisait en zone libre. Il n’avait jamais été fermé, alors nous nous en servons ».
Lorsque que vous abordez la question des soutiens que peuvent trouver les PME dans cette situation, les Tessiot père et fille sourient. A la question des moyens proposés par l’Etat, François Tessiot prend la parole « Vous savez, nous réalisons une prestation de garde meuble pour le ministère de la justice. En mars 2013, l’Etat n’avait plus de budget pour payer cette prestation jusqu’à la fin de l’année. Dans le même temps, les services fiscaux nous menaçaient de pénalités pour retards de TVA. Encore une chance que les agents du trésor sont compréhensifs. Ce sont même les seuls interlocuteurs qui ont compris notre situation, ils ont adapté les règlements. »
Sa fille ajoute « A côté de ça, j’ai tenté de contacter quelqu’un qui a un rôle important à la préfecture et qui m’a dit à mon second appel que je commençais à le harceler. Nous avions cru un moment que le commissaire au redressement productif pourrait être un soutien. En fait, il est tout seul à Orléans, avec une secrétaire qui ne travaille pas que pour lui. A la CCI ou au Medef, on vous écoute, on vous comprend, mais ils n’ont aucun outil pour nous soutenir. Les préfets disent qu’on peut négocier des moratoires avec les URSSAF, ça été possible à Bourges, mais sur notre filiale de Limoges, vous n’imaginez pas l’agressivité de nos interlocuteurs. Nous sommes devant le médiateur du crédit, ça fait des réunions, mais on ne voit pas beaucoup de résultats.
Une de ces histoire de patrons de PME qui deviennent hélas de plus en plus fréquente en temps de crise. Pourtant François Tessiot se veut combatif « l’entreprise est viable, si on avait accès à des moyens de financement normaux nous gagnerions de l’argent. Le groupe a des filiales dans les DOM TOM qui fonctionnent très bien. Nous resterons combatifs à Bourges, pour nos salariés et pour nos clients.
Une chose semble claire, François Tessiot aimerait changer de banquier « la confiance n’est plus là. Lorsque j’entends en plus que la Société Générale pourrait participer au financement d’un concurrent qui s’installe à Bourges, la coupe est pleine ».