Bon, d’accord, le film “A star is born” avec Bradley Cooper et Lady Gaga, a posteriori, plusieurs années après, se laisse regarder et n’est pas tant que ça un navet. Bon, d’accord, après plusieurs écoutes et une prestation yeux dans les yeux, grâce à une caméra hyper agile, sur la scène de l’Eurovision 2024 en Suède, la chanson “Mon amour” du candidat frenchy Slimane ne fait pas forcément battre tous les coeurs mais se retient et ne se révèle pas si fade. Peut-être faisons-nous, pour paraphraser un gros titre du quotidien national Libération, partie de la team « mauvaise foi ». Ou pas ! Peut-être de surcroît que notre esprit bourgeois et critique, journalisme oblige, s’avère davantage exacerbé, voyant souvent non pas la petite fleur mais le loup partout.
Alors, bon, okay, le choix surprise de Jul, le rappeur originaire de la cité phocéenne, plaisant beaucoup à la jeune génération et dont nous n’avions pour notre part jamais entendu parler (qui ça ? la vieillesse nous gagne), pour allumer le chaudron olympique le 8 mai, a permis en ces temps tourmentés et gris, d’offrir un instant de joyeuse lumière et de liesse populaire au public massé sur le vieux-port de Marseille. S’était glissée toutefois dans cet évènement soi-disant historique, une faille qui manquait de chic, du fait de playback et signe de doigts (marque de fabrique artistique certes) pas du meilleur goût qui auront un peu gâché les poétiques images du mythique trois-mâts Belem voguant sur la Méditerrannée, à l’occasion donc de l’arrivée de la flamme olympique des JO-JP Paris 2024. Après Aya Nakamura pour la cérémonie d’ouverture sportive dans la capitale le 26 juillet, plus rien n’est surprenant en termes de classe, mais quand même… Bon, okay, encore Taylor Swift est bien le phénomène pop du moment, même si niveau vocable, les « Swifties » n’ont rien inventé puisqu’à mon époque, j’étais une « Fighter », nom de baptême des fans de Xtina / Christina Aguilera (une popstar de son ère qui générait aussi des files de tentes quelques journées avant ses shows, devant les salles de concerts!), emprunté à l’un de ses tubes ; un son issu du très bon album »Stripped » sorti dans les années 2000.
Que le temps passe, les artistes également.Tandis que l’élégance française se perd, et … bientôt, malheureusement, la grammaire. Ce n’est pas être trop conservateur que d’être totalement choquée d’une presse qui utilise l’IA et notamment ChatGPT (intelligence artificielle en français) pour corriger et pire, écrire ses articles ! Bon, volontiers, même les artistes contemporains ont recours à ce biais parfois pour peindre des dragons; rien n’empêche de tester. Néanmoins, ce n’est pas être trop réactionnaire que d’être scandalisée par ce prix littéraire, équivalent de notre Goncourt, décerné à une Japonaise qui a reconnu sans sourciller avoir rédigé son roman “Tokyo-to Dojo-to” primé, à l’aide de procédés là encore artificiels ! Elle s’avoue même prête, depuis son pays assurément technophile, à continuer à utiliser cette IA pour sa future prose. Hum. Sans doute sommes-nous trop vieille France mais non, envoyer des cartes postales n’est pas désuet, tout autant qu’écrire un article ou livre, avec son ordinateur mais son cerveau et ses propres mots, n’est pas passé de mode.
Si les nouvelles technologies, et l’IA particulièrement, peuvent présenter des vertus dans certains domaines, les amoureux des lettres ne devraient jamais tomber dans cette marmite de fainéantise. Ou sinon, il faut cesser de se plaindre de la perte continuelle de lectorat(s). Si nous voulions positiver, ce mal pour un bien permettrait à un plus large sérail d’accéder aux trophées Albert-Londres et Renaudot, mais avec quelle dévaluation dont il serait ensuite déplacé de gémir, un peu comme pour la démocratisation des pesticides, on y revient… C’est effrayant et à l’instar du changement climatique, à force, la marche arrière ne semblera plus guère possible, avec son lot de bonheurs et de drames (humains et économiques).
« L’écriture est la peinture de la voix » (Voltaire). Bien que tout se transforme dans un monde et une société en totale déliquescence, rien ne se perd : défendons cette voie, quitte à paraître déjà ringards … mais à nouveau, fashion demain, parbleu !
Émilie Rencien