La charmante cité de Sancerre qui vient de rejoindre la Route Jacques Cœur vécut des heures terribles, lors d’un siège qui est resté un fait marquant de l’Histoire de France.
Dès 1534, les idées nouvelles de la réforme circulaient dans la ville, prêchées par le moine Jean-Michel. Elles séduisirent bon nombre de Sancerrois. En 1548, les Réformés exerçaient leur culte dans l’église Saint-Jean, dont l’emplacement était proche de l’église actuelle.
Sancerre, était un lieu stratégique majeur pour le parti protestant, de par sa situation entre les pôles éloignés du calvinisme, à mi-chemin de Genève et de La Rochelle, si bien qu’elle devint une ville-refuge pour les huguenots fuyant les persécutions. Elle entra bientôt en lutte ouverte avec Charles IX qui ne reconnaissait qu’une seule religion : la religion catholique.
Les Sancerrois refusèrent qu’une garnison royale s’installât au château. Cette rébellion provoqua l’intervention des troupes royales en 1568 et 1569. A chaque fois les assauts furent repoussés et les assaillants se retirèrent.
A l’automne 1572, au lendemain de la Saint-Barthélémy, la citadelle sancerroise offrit un asile aux protestants qui fuyaient la répression catholique. Elle abrita 500 réfugiés de toutes conditions, dont une douzaine de pasteurs et de lettrés réformés. L’un d’eux, Jean de Léry, tint une chronique de l’épreuve de force : « L’histoire mémorable de la ville de Sancerre ».
Dès septembre 1572, le roi Charles IX et le gouverneur du Berry, Claude de la Châtre, se mirent à préparer la prise de la place forte. En novembre, toutefois, leur attaque-surprise du château échoua. En janvier 1573, ils installèrent leurs troupes pour conduire le siège. Les Sancerrois ayant résisté aux assauts de février et de mars, Claude de la Châtre décida alors le blocus de la ville.
Le blocus allait durer plus de quatre mois, pendant lesquels les Sancerrois espérèrent vainement une aide extérieure. On abattit les chevaux, on rationna le pain et on expulsa les pauvres. Pour calmer sa faim, on finit par manger des ragoûts d’ardoises pilées, des souris, les peaux et les cuirs qu’on trempait, qu’on découpait et qu’on faisait bouillir, … Grâce aux nombreux puits, l’eau toutefois ne manquait pas. Mais la famine fit des ravages : environ 500 morts, dont de nombreux enfants. Le 20 août 1573, la place forte réformée capitulait ; le 31 août, Claude de la Châtre fit son entrée officielle dans Sancerre.
Les soldats sancerrois quittèrent la ville, fièrement, sous la haie d’honneur de leurs assiégeants qui rendaient ainsi hommage à leur résistance héroïque.
Après la reddition de la ville, l’échevinage fut aboli, les portes de la ville furent brûlées, les tranchées, creusées à l’intérieur, comblées et les tours de défense abattues.
Le maréchal de la Châtre fit transporter, d’abord à Nancay dans son château, puis à Bourges, la cloche du beffroi et le mouvement de son horloge, afin qu’aucune « marque de ville » ne subsistât. Il y a une dizaine d’années, ces deux éléments majeurs de l’Histoire, revinrent à Sancerre pour reprendre leur place dans le beffroi…