Pierre de Ronsard est né en Vendômois, au manoir de la Possonnière, vraisemblablement dans la nuit du 10 au 11 septembre 1524. Il semble promis à une carrière de militaire ou de diplomate. A douze ans, le voici page dans la maison des enfants de France, à seize il est secrétaire de l’ambassadeur de François 1er en Alsace.
C’est peu après qu’il contractera une maladie qui le rendra à demi-sourd. Devant renoncer aux carrières des armes et de la diplomatie, il se tourne vers la poésie en 1543 après une rencontre décisive avec le poète Péletier qui accueillera les premières œuvres de son protégé. Déjà, sans doute, sa voie personnelle est-elle tracée, son plan de vie, sinon de carrière, arrêté : il s’agira de « goûter le vin et les femmes, être poète et promis à l’immortalité ». Dès lors, à l’école de Virgile et de Pétrarque, il sera de ces gentilshommes poètes qui, à la Renaissance, auront fait de la Touraine et de l’Anjou « le jardin des lettres françaises ».
Pour l’anecdote, on se souviendra de la rencontre que le poète fit lors d’un bal de la Cour, à Blois, en avril 1545. Il croise le regard de la belle Cassandre Salviati, rencontre qui hante le recueil des « Amours », mais l’on saura aussi ne pas oublier une autre femme, d’autres amours assurément moins idéalisées, celles que Ronsard connaîtra avec Marie, qu’on croit être Marie Dupin, paysanne des environs de Bourgueil, « fleur voisine d’un ruisseau » qui inspirera la « Continuation des Amours » et la « Nouvelle Continuation ». La manière de ces poèmes est « toute simple et toute fine », comme la beauté « sans enflure et sans fard » qu’ils évoquent.
Peu versé dans les querelles dogmatiques, le poète hésitera longtemps à choisir son camp dans la sombre querelle religieuse qui met à mal le royaume. Le printemps 1562 voit les huguenots piller les églises, quelques mois plus tard Condé menace Paris. Alors Ronsard, qui compte des amis chers dans les deux camps, prend parti. Mais sa prise de position en faveur du parti du roi et de l’Eglise apparaît moins comme un choix religieux que comme le souci de préserver l’intégrité du royaume. Cela lui vaudra mille injures, mille attaques de l’adversaire, à quoi il répondra dans une superbe « Réponse aux injures et calomnies de je ne sais quels prédicants et ministres de Genève », « Je sers à qui je veux, j’ai libre le courage ».
Au jardin de Touraine était jadis un chevalier poète à la fière cambrure…
Le fameux poète du Loir vendômois, Ronsard, est généralement présent comme un doux sentimental. Or il a laissé nombre de poésies qui le montrent sous un aspect très différent, celui d’un grand polisson qui n’a pas peur des mots… donnons quelques exemples :
« Si je trépasse entre tes bras, ma dame,
Je suis content, aussi ne veux-je avoir
Plus grand honneur au monde que me voir,
En te baisant, dans ton sein rendre l’âme ».
Et encore plus polisson :
« Ah je meurs, ah baise moi !
Ah maîtresse approche toi !
Tu fuis comme un faon qui tremble.
Au moins souffre que ma main
S’ébatte un peu dans ton sein,
Ou plus bas si bon te semble »
Et pour terminer en beauté, Ronsard se fait de plus en plus pressant :
« Asseyons-nous sur cette molle couche :
Sus, baisez-moi, tendez-moi votre bouche,
Pressez mon col de vos bras dépliés
Et maintenant votre mère oubliez.
Que de la dent votre tétin je morde,
Que vos cheveux fil à fil je détorde… ».
On comprend mieux les vers célèbres de cet amoureux :
« N’attendez à demain, cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie ».
Ajoutons cependant que Ronsard ne fut jamais très heureux en amour, en particulier avec la Cassandre de Talcy, et quelques autres moins connues demeurées moins célèbres.