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Romorantin : Colonna dans l’expectative, 150 emplois dans la balance

Un gros contrat résilié et c’est tout l’équilibre d’une entreprise qui est remis en jeu. Direction et salariés, à l’unisson, crient à l’injustice et se battent pour inverser ce couperet.
Le spectre de la fermeture de l’usine Matra et son traumatisme économique, toujours présents dans les mémoires, ressurgissent dès l’annonce d’une mauvaise nouvelle sur le bassin de Romorantin. Même si l’affaire n’est pas comparable : ce printemps 2023, le groupe Colonna Facility (mutuelles, courtiers en assurances), deuxième employeur de Romorantin qui possède cinq sites, dans le centre-ville de Romorantin depuis plus de quinze ans, et y emploie 300 personnes, craint non pas de mettre la clé sous la porte mais de devoir se séparer de 150 emplois. Malgré l’adversité inopinée, les sourires demeurent affichés parmi les salariés de Sologne, pas du tout résignés. Bien au contraire ! Pas non plus de coups d’épée : le directeur du site de Romorantin depuis 2010, Mathieu Naquin, et Sébastien Bordier, porte-parole du collectif des salariés, affichent d’emblée leur même longueur d’onde sur un récent et fâcheux dossier. Lequel ? Deux instituts de prévoyance, Klésia et Malakoff-Humanis, ont résilié le contrat de délégation de gestion des frais de santé et prévoyance de la branche café-hôtellerie-restauration (soins, arrêts maladie notamment) confiée jusqu’alors à Colonna. Le portefeuille est d’importance puisqu’il pèse plusieurs millions d’euros et des centaines de milliers de clients, et menace en mode roulette russe donc une centaine de postes chez Colonna à Romorantin, soit la moitié de ses effectifs. Ce qui est vécu sur place comme une marche arrière cruelle. “Ce contrat nous avait permis il y a quelques années de passer de 76 salariés à Romorantin à 300 aujourd’hui ! Nous avions remporté l’appel d’offres Santé en 2010. La résiliation s’est opérée sans argument, et surtout sans consultation des clients. On nous a en quelque sorte adressé un courrier du style “bonjour, merci, au revoir”. Pourtant, nous n’avions que des félicitations. Tout le monde reconnaît notre qualité de travail. Cette décision n’a pas de sens !” récusent MM. Naquin et Bordier, sous le regard de leur directeur de la communication, Vincent Guérinet. “Nous ne sommes pas une plateforme à l’étranger, nous sommes sous le label France Garantie. Nous sommes une entreprise locale qui connaît ses dossiers par cœur avec un service et suivi sans accrocs. Une question de tarifs ? Impossible à dire car nous n’avons encore une fois reçu aucune explication. Nous n’y comprenons rien car nous avons toujours été ouverts au dialogue. Tout allait bien jusqu’à la réception de ce courrier fin juin 2022.”

L’espoir d’un nouvel appel d’offres
L’explication réside sans doute dans le remplaçant, c’est-à-dire le groupe Diot-Siaci retenu comme nouveau délégataire… Hormis la médiatisation, quelle est la marge de manœuvre alors ? Les dés sont-ils jetés ? L’épée de Damoclès pèsera jusqu’au 31 décembre 2023, date butoir à partir de laquelle des emplois risquent ensuite de disparaître chez Colonna Romorantin, ce qui pourrait évidemment créer un effet boule de neige sur les familles, les effectifs scolaires, etc. de la ville et du département. Colonna croise donc les doigts pour que les clients concernés par ce contrat rompu à l’unilatérale se manifesteront pour relancer le jeu et donner la chance aux Romorantinais de re-postuler. L’appel d’offres privé remporté par Diot-Siaci s’est déroulé en effet sans Colonna…”Nous voulons de la transparence ! Oui, la meilleure solution serait un nouvel appel d’offres. Si nous le perdons, nous accepterons la donne. Contrairement à ce choix de résiliation injustifié et incompréhensible, face auquel nous n’avons même pas de droit de réponse. Le nouveau gestionnaire fait du offshoring (en français, de la délocalisation). Nous nous inquiétons sur le sort réservé avec cette rupture à nos clients pour lesquels nous étions un guichet d’entrée unique, de proximité, en France, ” insiste Sébastien Bordier. Le préfet de Loir-et-Cher, François Pesneau, a commenté pour sa part fin mai depuis Blois. “Colonna était titulaire d’un marché. C’est un sujet de droit. Il existe des recours juridiques si jamais, et il reste aussi à l’entreprise l’espoir d’un appel d’offres. Elle peut le gagner. Si l’entreprise par contre le perd, elle devra revoir sa recherche économique.” Le mois dernier, la moitié des salariés de Colonna ont été reçus à Paris (Cf. la photo fournie par l’entreprise, pour illustration de cet article), lors d’une Commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation de la branche. Deux syndicats, CGT et FO, sur quatre, selon Colonna, ont écouté. Et entendu ? “Les deux autres, CFDT et CFE-CGC, sont sortis. Un fait inadmissible de la part des partenaires sociaux,” déplore M. Bordier. Une autre Commission devrait se tenir fin juin / début juillet, et répondra peut-être aux interrogations. “Nous n’allons pas nous laisser faire,” conclut fermement Mathieu Naquin.

Émilie Rencien

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