Ecrivain berrichon, auteur d’une dizaine de livres, Raymonde Vincent a obtenu en 1937 le prix Fémina avec son premier roman « Campagne ». Méconnue aujourd’hui, certains de ses ouvrages venant d’être réédités, tentons de découvrir cette femme étonnante.
Née dans une famille paysanne en 1908, elle grandit à Villours près de Levroux dans la ferme familiale. Malheureusement sa mère meurt en 1912 et elle est confiée à sa grand-mère. La fillette ne va pas à l’école, elle apprend à lire en regardant le journal et en déchiffrant le catéchisme. Elle aide aux travaux de la ferme, principalement en gardant les vaches et les chèvres. Dès qu’elle est en âge de travailler elle s’embauche dans des ateliers de confection castelroussins d’où elle est renvoyée plusieurs fois. A 17 ans elle part pour Paris avec le but de devenir chanteuse. Elle trouve un travail dans une laiterie, mais peu attentive à son travail, elle n’y reste pas longtemps. Son esprit vagabondait toujours. Elle devient alors modèle pour des peintres comme Christian Caillard, Eugène Dabit ou Georges Klein. Ceci lui permet de vivre. Elle fréquente les cafés parisiens, notamment le Dôme où elle rencontre Albert Béguin, critique suisse, traducteur de romans allemands, directeur de la revue Esprit. Très amoureux, ils ne tardent pas à se marier. Très croyante, elle amène Béguin qui est athée à se convertir au catholicisme. Il lui fait découvrir la littérature et principalement les livres de Marguerite Audoux ou le grand Meaulnes.
La jeune femme s’instruit, acquiert une culture artistique et musicale. Pourtant c’est la nostalgie de son enfance paysanne qui va la pousser sur les voies de l’écriture. Elle fait connaissance avec des écrivains comme Bernanos ou Aragon et voyage beaucoup : Belgique, Corse, Suisse. Elle écrit son premier roman Campagne avec lequel elle remporte le prix Fémina : Marie, quinze ans, et sa grand-mère, presque quatre-vingts, partent s’installer chez l’oncle de la petite, dans la Ferme des Chaumes, après l’annonce de la mobilisation générale. Quittant leur hameau, elles découvrent une nouvelle vie.
Lors d’un séjour en Allemagne elle constate la montée du nazisme et elle prend conscience de la nécessité de lutter. La guerre éclate et elle s’engage dans la Résistance. La guerre finie, elle quitte Albert Béguin. Elle publie d’autres livres comme « Orages » qui n’auront pas le même succès que le premier. Raymonde Vincent revient de temps en temps dans l’Indre avec Monique et André, les enfants de sa sœur jumelle qu’elle a adoptés pour qu’ils ne soient pas placés à l’assistance publique.
Lorsqu’elle apprend qu’Albert Béguin est très malade en Italie, elle va le rejoindre pour rester à son chevet jusqu’à sa mort en 1957. Après la mort de son mari elle décide de s’installer définitivement en Berry. Elle achète une maison avec un beau jardin à Saint Chartier en 1959. C’est là qu’elle va écrire son dernier livre, une réflexion autobiographique « Le temps d’apprendre à vivre » (qui vient d’être réédité aux Editions La Bouinotte)
Elle devient presque aveugle et meurt le 5 janvier 1985, demandant à être enterrée près de sa mère au cimetière de Saint-Lactencin. Elle laisse un roman non publié « Hélène » qui le sera après sa mort.