Combien de fois avons nous traité dans nos colonnes la fragilité de ce site remarquable, ilôt de terre et d’eau, à deux pas du cœur de la cité historique ? Aujourd’hui, une nouvelle alerte survient avec une pollution aux hydrocarbures affectant la rivière Le Langis qui irrigue principalement la partie nord des marais d’en Haut. Explications.
France Camuzat, président de l’Association des Maraichers de Bourges (AMB), fait part de cette énième pollution, dénoncée depuis des années autant par son association que par celle de Patrimoine Marais. « Cette pollution a été repérée début quatrième semaine de janvier 2019 par les maraîchers du secteur de Saint-Ursin* et les services de la ville confirment ainsi que ce cours d’eau est devenu un égout ». Depuis des années, les pollutions véhiculées par Le Langis s’aggravent. À chaque crue en particulier, il se décante et se dépose dans les marais, des tonnes de terres et déchets divers (physiques, chimiques). L’AMB n’a eu de cesse d’alerter les autorités (Etat, collectivités…) à force de dossiers avec photos, analyses de vases (2009-2014) adressés au ministère de l’écologie (2014-2017), aux services régionaux, locaux ; des conférences de presse ont eu lieu pour informer l’opinion… En février 2018, le service technique de la préfecture s’est enfin décidé à réunir les partenaires des marais et cela a débouché sur un plan de travail en sept actions. Une seule semble devoir traiter ce problème de pollution pour : « réfléchir à la mise en place d‘un système de décantation ».
Mais quand va-t-on se décider à agir ?
On comprend la colère des maraîchers face à cette inacceptable léthargie des pouvoirs pour un site qui, rappelons-le, est classé depuis 2003 et qui présente selon le code le l’environnement art L 341-1 « un intérêt général ». France Camuzat précise : « C’est d’autant plus choquant que l’action 7 de ce plan de travail propose une structure locale pour représenter les usagers dont l’intérêt, je cite « que cette structure unique pourrait plus facilement mobiliser des fonds auprès des financeurs et assurer la maîtrise d’œuvre d’actions concrètes »… autrement dit : propriétaires maraîchers débrouillez vous pour trouver des sous, organiser et faire faire des travaux ». On se souvient qu’en 1998, la mise en place d’une association syndicale autorisée (syndicat des propriétaires) avait été rejetée par 76% des 675 votants. France Camuzat souligne également qu’il existe aujourd’hui une procédure du code de l’environnement : délégation d’intérêt général qui permet d’obtenir des fonds publics pour des travaux considérés d’intérêt général. Autre sujet d’inquiétude, et pas le moindre, est le point de captage d’eau potable de Saint-Ursin situé tout près des marais : « Ce captage est important pour la ville et l’agglomération. Sa protection a besoin d’être fortement renforcée. Une enquête publique (14 mai / 14 juin 2018) a proposé des mesures importantes. La quasi totalité des marais d’en haut est concernée. Le commissaire enquêteur a rejeté l’enquête jugée « peu crédible » en septembre 2018. Tout est à refaire ? Même si les enjeux sont différents, protéger les marais classés et ce captage vont de pair. Il serait plus que temps que les autorités en prennent conscience ».
*Saint-Ursin : Situé derrière la grande surface Carrefour, chaussée de Chappe.
Jacques Feuillet