Rififi dans le pré ! Le Mouvement de la ruralité (LMR), qui promeut et défend le monde rural, traverse une mauvaise phase. Son nouveau président, le Vendômois Éric Doumas, hier mis sur l’estrade, devient la tête de Turc des cadres du parti. Une histoire compliquée qui risque de desservir cette formation politique.
Après l’adoubement, le poignard dans le dos. Difficile d’y voir clair dans une affaire, traditionnelle en politique sans doute, mais tout de même, ici à la limite de la schizophrénie. L’hiver dernier, le président Eddie Puyjalon, selon les bruits de coulisses, souhaite passer la main et le loir-et-chérien Éric Doumas, alors secrétaire général national depuis 2021, est ainsi mis en avant par ses soins. Porté aux nues jusque sur le podium, c’est bien ce M. Doumas qui est élu à la tête de la présidence de LMR en novembre 2022 par 75% de votants. “Soit 1 200 / 1 300 voix,” d’après le nouveau président dans la place pour cinq ans. Le siège national de Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques, a été déménagé au centre de la France, à Salbris, en Sologne (“dans le Vendômois, après demande, il n’y avait pas de local disponible, qui nous correspondait,” dixit M. Doumas). Des rencontres contre l’éolien devaient avoir lieu sur cette même commune en avril. LMR a été reçu à l’Assemblée nationale. Etc. Tout semblait aller bien et puis, patatras, l’ancien président veut reprendre le fauteuil. M. Puyjalon estime en effet qu’Éric Doumas a perdu le soutien de « 80 % des cadres » de LMR. Le tribunal de Blois, saisi, a pourtant donné fin mai 2023 gain de cause en confortant ce président Doumas dans son siège. Mais en parallèle, un comité directeur, réuni le 3 juin, a élu un nouveau bureau national et un nouveau président en la personne du Dunkerquois, Bernard Borel ! Vous suivez toujours ?
“Magouilles internes”, “putsch”…
Une mère canard n’y retrouverait pas ses petits ! Quelle issue pour cet imbroglio ? À qui profite le crime ? Des morceaux du puzzle manquent. “C’est du grand n’importe quoi,” commente M. Doumas, en visio-conférence le 31 mai. “Peut-être que cela n’a pas plu aux barons du parti que LMR, anciennement “Chasse, pêche, nature et traditions”, élargisse son horizon. Avec mon équipe, j’ai souhaité sortir de la seule défense de la chasse et de la tauromachie. La ruralité, ce sont de nouveaux habitants, de l’innovation, du tourisme, de l’emploi agricole, la préservation de la biodiversité. Oui, nous voulons porter une écologie intelligente. Nous avons des projets pour développerMR; nous n’allons pas passer notre vie à faire appel à notre avocat ! ” Il ajoute en ironisant. “J’ai appris via Le Canard enchaîné que nous nous rapprochons de Reconquête, les bras m’en sont tombés ! Cet article était consacré au maire de Salbris, Alexandre Avril, avec lequel nous avons de bonnes relations; nous ne sommes sûrement dans ce papier qu’un dommage collatéral”. Un LMR trop radical et / ou écolo, donc peut-être ? “Non ! La ruralité, ce n’est plus dire, l’hiver, je chasse et l’été, je suis sur mon tracteur,” argumente Philippe Moreau, maire de Nogent-en-Vernisson (45), soutien du président Doumas (tout comme la première vice-présidente, Claire Dimitriades). “Nous vivons un putsch chez LMR ! J’ai quitté les Républicains (LR), à cause d’une trop grande diversité de pensées, entre “Nouvelle énergie” de David Lisnard, la vision d’Aurélien Pradié, celle de Xavier Bertrand, d’Éric Ciotti. Je ne pensais pas retrouver des magouilles internes dans un plus petit parti. Il ne faut pas s’offusquer ensuite que les citoyens désertent les urnes ou votent pour des extrêmes ! La politique des copains, c’est d’un autre temps, et à un moment, ce sont les Français qu’on perd.”
Émilie Rencien