AU VERT Une foire bio qui chemine vers son demi siècle, une société pomologique et ses vergers conservatoires, désormais un magasin de producteurs bio. Neuvy est la capitale du bio dans l’Indre.
Pierre Belsoeur
Neuvy, sa basilique du XIe siècle édifiée sur le modèle du Saint-Sépulchre de Jérusalem, seul monument de l’Indre classé au patrimoine de l’UNESCO, possède une autre particularité. Depuis 43 ans elle est point de rencontre des adeptes du bio. Ceux que l’on prenaient pour de doux rêveurs à la fin du XXe siècle sont en train de gagner la partie. Le chef-lieu de canton du Boischaut a la légitimité pour devenir le fédérateur des producteurs bio du département.
Une édition miraculeuse
Quarante quatrième édition de la foire bio, ça vous donne le sentiment d’une affaire qui roule. Et pourtant le comité d’organisation qui a permis aux apôtres du bio de se retrouver à Neuvy le dernier week-end d’août a vu le jour … en mars 2018. « Paul Raveau avait créé cette manifestation au milieu des années 70, résume Dominique Viard, vice-président de Neuvy Eco Bio et puis Le Gargaillou, l’association qui portait la manifestation s’est essoufflée ( Preuve que le développement durable peut lui aussi être victime de l’obsolescence des bénévoles NDLR). La municipalité a repris le flambeau pendant deux éditions, pour éviter que ne meurt la Foire. Mais ce n’était pas sa vocation, alors on a décidé de se lancer le 1er janvier 2018. On a eu jusqu’à vingt-huit personnes lors des premières réunions et en fait on s’est retrouvé avec un noyau de huit personnes pour mettre sur pied cette 44e édition. Heureusement nous avions la municipalité et ses services techniques pour installer la Foire. Espérons que le succès de cette nouvelle édition attirera vers nous d’autres personnes qui souhaitent s’engager dans la promotion du bio de proximité.»
Car la motivation du comité n’était pas seulement de remplir sa foire. Avec quatre-vingt-cinq exposants, quand le périmètre permet d’en accueillir au maximum cent-vingt, le résultat est tout à fait satisfaisant. La satisfaction de Dominique Viard c’est de faire revenir les producteurs locaux. Des maraîchers bio en particulier. « Car à la base, le bio c’est d’abord la production de fruits et légumes.» Et Dominique a bu du petit lait en écoutant Jean-Louis Rastoin le samedi soir. Le directeur de la Chaire UNESCO « Alimentations du monde», a expliqué lors de sa conférence «Pourquoi nous devons accélérer la transition vers une alimentation plus durable» que la survie des hommes sur une planète qui dépassera bientôt les dix milliards d’individus, passe par une production régionale de nourriture et que l’on arrive au bout du schéma de production mondialisée avec une spécialisation des productions (le soja brésilien ou le blé de Beauce par exemple) qui conduit à l’appauvrissement des sols.
Une vitrine pour ceux qui innovent
« Le rôle de notre foire, c’est l’enrichissement des producteurs locaux par des consommateurs qui viennent de l’extérieur. Je n’ai rien contre le producteur de savon de Marseille ou de barbecues du Mexique, ils ont leur place sur la foire bien évidemment, mais il faut que nos producteurs bio de l’Indre et des environs reprennent le premier rôle. Ils avaient pratiquement disparu de la Foire de Neuvy. Cette fois nous avions trois stands de fruits et légumes locaux. C’est un début.»
Plus largement, la Foire de Neuvy peut devenir la vitrines de multiples initiatives d’AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) et de groupements de producteurs qui voient le jour dans l’Indre. Neuvy attire un public de sympathisants qui ne demandent qu’à basculer dans ce nouveau mode d’alimentation plus durable et plus sain.
Contact : neuvyecobio@gmail.com
La société pomologique du Berry, petite sœur de la foire bio
La société pomologique du Berry a sept ans de moins que la Foire BIo mais revendique plus de sept cent membres. Il faut être membre de l’association pour accéder à l’atelier jus de pomme.
C’est encore à Paul Raveau, à son complice Jacques Aubourg, rejoints par des ingénieurs agronomes Gabriel Darrault et André Marlaud ( auteur de la méthode de détermination des variété de pommes, ouvrage de référence) et de quelques autres que l’on doit le verger conservatoire des variétés anciennes.
Pourquoi Neuvy ? Parce que la foire bio y existait depuis sept ans et que la mairie de Neuvy a fourni les terrains sur lesquels ont été plantées les variétés anciennes de pommiers et puis au hameau de Ville, le conservatoire des fruits à noyaux, puis de la vigne et dernière nouveauté, des chataîgners. Et l’association a pignon sur rue avec sa maison de la pomme, face à la salle des fêtes, au coeur de la foire bio.
Une maison qui abrite, outre les salles de réunion et les bureaux de l’association, les installation de production de jus de pomme pasteurisé, depuis 1998, auxquelles s’est adjoint un atelier de fruits séchés. C’est cet atelier qui permet à l’association de revendiquer 750 adhérents, et de financer les emplois de deux personnes pour l’entretien des vergers, les démonstrations de greffage, les interventions éventuelles dans les vergers des adhérents et un emploi à temps partiel d’une secrétaire.
150 000 litres de jus de pomme sont produits en moyenne chaque année par cet atelier. Pour faire presser ses pommes il faut évidemment être adhérent de l’association.
L’assocation pomologique organise deux manifestations chaque année. Les journées de la pomme, dont la 37e édition aura lieu les 27 et 28 octobre avec au programme des ventes de pommes et plants de variétés anciennes , conférences , animations musicales.
Fin février, les jardinier ont de nouveau rendez-vous à Neuvy avec des porte- greffes, afin de se faire greffer les variétés de leur choix, grâce aux greffons prélevés dans le conservatoire.
Contact : www.pomologie-neuvy.fr
societe pomologique.berry@wanadoo.fr
Le local, le nouveau magasin bio des producteurs
L’ancienne caserne de pompiers a été réaménagée par la Ville en local commercial. Du coup Neuvy a retrouvé un boucher.
On ne trouve pas de tout au «Local». La raison d’être de ce local est de commercialiser la production des paysans adhérents de cette Société Coopérative d’Intérêt Collectif dont Bertrand Joyeux, paysan à Saint-Plantaire, est le premier président. «Non, mon métier n’est pas de tenir le magasin, nous nous relayons, mais c’est du bénévolat intéressé puisque nous y vendons nos produits, notamment la production de quatre fermes du Boischaut et du Nord de la Creuse ce qui représente dix paysans. La société rassemble une trentaine de producteurs et une soixantaine de souscripteurs. Mais on n’est bien évidemment pas obligé d’être membre de la société pour acheter au magasin.»
Pourquoi Neuvy ? « Nous avons pris contact avec différentes communes : Aigurande, Argenton, Eguzon, mais c’est Neuvy qui a immédiatement cru en notre projet et aménagé ce très beau local pour nous accueillir.»
Placardée dans le magasin, la charte des producteurs met noir sur blanc leur engagement et notamment «Proscrire toutes méthodes de production nuisible à la santé des humains et à la nature.»
Le rayon légumes et fruits occupe bien évidemment une place de choix. On trouve aussi des produits laitiers (avec des yaourts dans des pots de verre consignés!)du pain, du vin, des confitures, du miel et un rayon boucherie très pro. «Nous évitons de vendre du porc, précise Bertrand, car il reste une charcuterie à Neuvy. Nous ne sommes pas là pour nuire aux commerçants». En revanche la présence du «Local» peut attirer une nouvelle clientèle pour le commerce local.
Ouvert début avril Le Local a connu un démarrage foudroyant avant que l’activité faiblisse à l’entrée des vacances et retrouve actuellement une vitesse de croisière très satisfaisante. L’expédition de colis à partir de commandes Internet n’est pas actuellement à l’ordre du jour.
Le magasin est ouvert le mardi matin , le vendredi et la samedi toute la journée et le dimanche matin ( de mars à octobre pour ce dernier créneau)