Morée : LCP au collège, sur le sujet de l’autisme


“ZED” pour “Zone d’éducation documentaire”. C’est l’intitulé d’une émission quotidienne, présentée par la journaliste Valérie Brochard sur la chaîne parlementaire, LCP (Assemblée Nationale). Ces caméras se sont posées dans le Loir-et-Cher le 27 novembre pour enregistrer un numéro diffusé le 1er décembre en soirée à la TV. Et nous y étions.
Le principe est simple comme bonjour : pour donner la parole aux jeunes, pour les confronter aux enjeux du monde et les aider à décortiquer le travail journalistique, LCP pose ses caméras dans un établissement scolaire. Une classe visionne et étudie un documentaire avec l’un de ses professeurs et échange ensuite avec l’auteur ou le réalisateur lors d’un débat animé par Valérie Brochard. Et il se trouve que cette discussion s’est ouverte lundi 27 novembre dans les murs du CDI du collège Louis-Pasteur de Morée, dans le Nord du Loir-et-Cher. Filles et garçons d’une classe de troisième ont eu l’opportunité de passer à la télévision tout d’abord et de vivre une expérience de tournage tv, mais également de s’interroger sur la différence, et plus spécifiquement, le handicap qui peut survenir à la naissance mais également plus tard dans chaque vie en fonction d’éventuels accidents ou juste selon le simple fait de la vieillesse. Les élèves de ce collège sont sensibilisés toute l’année sur ces sujets, ne sont pas hermétiques à l’exercice puisque, par exemple, l’an dernier, le ministre de l’Éducation nationale de l’époque, Pap Ndiaye, était venu en visite sur cet établissement, pour découvrir “ParaMorée », le projet de voyage de collégien(e)s en cinquième aux Jeux paralympiques de Paris en 2024, parrainé par l’athlète handisport multi-médaillée et loir-et-chérienne, Marie-Amélie Le Fur. Le déplacement de LCP au sein de ce lieu d’enseignement au moins de novembre 2023 résonnait donc presque comme une évidence, d’autant plus lorsqu’on sait que le documentaire à étudier, choisi par LCP, avant un enregistrement d’émission dans les conditions du direct de l’émission, portait sur le sujet de l’autisme. Les adolescent(e) ont ainsi, pu le 27 novembre, face aux caméras, discuté avec la ministre déléguée en charge des personnes handicapées, Fadila Khattabi, et aussi et surtout avec Mickey Mahut, le père de Tom, un garçon qui vit -, fait du hasard mais avec une orthographe différente,- à Moret, en Ile-de-France (Seine-et-Marne), et a été diagnostiqué à l’âge de deux ans et demi comme autiste de syndrome Asperger.

Un petit chasseur de fantômes pas comme les autres
Ce père de famille a réalisé, avec Laurent Kouchner, en 2022, le documentaire audiovisuel “Le petit chasseur de fantômes” (visible sur Dailymotion – Avec le soutien de la Fondation Malakoff Humanis Handicap), mettant en scène de manière complice son fils, Tom, né à Fontainebleau, en 2010. Tom aime, pour se détendre, agiter un petit pinceau qui ne le quitte que rarement, ou encore marcher comme un pigeon. Tom, qui adorait les chemins de fer et est passionné aujourd’hui par les chiens, aimerait devenir, comme dans le film des années 1980, “Ghostbusters / SOS fantômes”, que les collégiens de 2023 ne connaissent pas forcément, devenir un chasseur professionnel de fantômes ! Ce documentaire père-fils a reçu le prix du public INA Madelen du FIPADOC à Biarritz (Festival International Documentaire 2023), et un prix de la RTBF lors du festival “The Extraordinary Film Festival” qui lui vaudra d’être bientôt diffusé en Belgique. Derrière cette séance de visionnage, la classe de 3e A du collège de Morée a pu, dans une émotion partagée, découvrir un certain parcours du combattant, et en même temps, le fait qu’être handicapé peut se révéler être une force. C’est dans ce sens positif que Mickey Mahut a conçu son propos documentaire, qui montre d’autres autistes qui ont réussi à mener leurs vies selon leurs envies en Israël, Au Danemark et au Canada. Pour interpeller différemment la société et interroger les écueils notamment français (professeurs bienveillants mais maladroits, car pas suffisamment formés, et les limites de l’inclusion en milieu ordinaire à tout prix pour des individus non ordinaires, par exemple). Tom, collégien de cinquième, a par ailleurs de son propre chef récemment écrit au nouveau ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal et au Président de la République, Emmanuel Macron, concernant ses problèmes au sein de sa nouvelle classe spécialisée Ulis (Unité localisée pour l’inclusion scolaire) qui peuvent échapper aux adultes “normaux” et qui peuvent complètement en parallèle perturber le jeune garçon dans sa scolarité. Présente à Morée, fin novembre, la ministre déléguée, Fadila Khattabi a reçu aussi cette missive. Cette dernière, qui a raconté brièvement son parcours d’enseignante et de députée, ainsi que son entrée au Gouvernement depuis son soutien dès 2017 au président Maron, a répété à plusieurs reprises que “ça avance”, citant dans sa communication tous les euros engagés (680 M€), un personnel accru en nombre (49 000 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) en 2017, contre 136 000 actuellement), ou encore un nouveau service gratuit de diagnostic de l’autisme annoncé par l’Élysée. Mais à la suite de la séance tv, il est légitime de se demander si cela est suffisant pour une famille, comme celle de Tom, qui cherche davantage de l’humanité que des budgets (bien que nécessaires) … Pour celles et ceux qui aimeraient se forger leur propre opinion et auraient manqué la première diffusion le 1er décembre sur LCP (chaîne numéro 13 sur le canal TNT), pas de panique, le documentaire et l’émission sont à (re)voir sur www.youtube.com/watch?v=BkKVbC83MKU. Vous verrez, ce petit chasseur de fantômes n’est certes pas comme les autres mais sa singularité, dans une ére particulièrement folle, où la peur de l’autre revient, peut enseigner bien des choses de la vie essentielles, que la “normalité” fait parfois oublier.
É. Rencien