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Molière revient, on a les mêmes à la maison

Tout le monde vous le dira, ce n’est pas parce que Jean-Baptiste Poquelin dit Molière est né voilà quatre siècles qu’il n’est pas d’aujourd’hui. Bon, pour les œuvres à monter, il faut mettre de côté la musique de Lully quand même. Dans notre société 2.0, il se serait régalé le gars Molière. Les tares et les qualités de nos congénères, de nos politiques, de nos élites et de notre plèbe sont omniprésentes aujourd’hui encore. La royauté genre des Louis, croix bâton vé ou pas bâton, est certes dépassée depuis des lustres, cependant les caractères sont toujours aussi marqués.
Lors de sa Première, sur la scène de théâtre du Palais Royal, tandis que se joue son Tartuffe, Molière dénonce l’hypocrisie du moment, celle des magouilles religieuses, celles de ces nobliaux issus de haute volée ou pas, de ces nazes parvenus du blaze, des serviles et des flatteurs. Regardez bien, aujourd’hui encore, comme Léon et ses raviolis Panzani, on a les mêmes à la maison. Les Dom Juan de pacotille, les malades imaginaires et les médecins malgré eux, les sournois et leurs scapinades, se ramassent à la pelle en toutes saisons. Les bourgeois rarement gentilshommes, trop souvent pédants, ont changé de nom. C’est bien la seule modification. Le royaume des faux-semblants, celui des faux-culs aussi, est devenu République. Nos Harpagon, nos Géronte, nos Célimène, s’appellent Éric, Emmanuel, Jean-Luc, Anne, Christiane ou encore Valérie, désormais. Si encore ils se cantonnaient à notre Hexagone. Que nenni, hors frontières donc, ce n’est pas mieux. Les Vladimir, Joe, ou Roberta ne valent pas davantage que nos exemples Franco-Français. Comme quoi, on peut s’auto-flageller autant que l’on veut, ce n’est pas un problème culturel puisque l’on les retrouve à l’identique ailleurs. Des fois pire aussi ! Cela n’excuse pas tout certes mais participe d’une autre vision du monde, non ? Monsieur de Talleyrand-Périgord – pour ceux qui ne connaîtraient pas ce personnage réel de notre histoire, c’est un mixte entre François Mitterrand et Charles Pasqua – aurait assuré que « Quand je me regarde, je me désole ; quand je me compare, je me console… » Filou et diplomate comme un Claude Guéant d’avant tribunal, le Charles-Maurice de Valençay !
L’Histoire est un perpétuel recommencement. Aux mêmes maux, mêmes effets. Si nous avons Civitas et consorts pour baver sur nos rouleaux de printemps, J.B.P avait la Compagnie du Saint Sacrement pour visionnaires presbytes, beaucoup moins voyants que casse-burnes cependant. Prenez Bolloré par exemple. Le gars est un cumulard du spectacle vivant. On a vu récemment que l’impro ce n’est pas son truc. Par contre, la comédie, le drame, il est capable dans presque tous les genres. Vincent en Tartuffe est à l’image de Louis Seigner en Bourgeois gentilhomme, magnifique. Pourtant, il ne peut pas tout faire. Deux rôles lui échappent, celui de Scapin et celui d’Alceste. Le premier, pas si fourbe qu’on voudrait le faire paraître, pourrait être un paletot à endosser par Poutou. L’anarchie, tout ça, c’est un peu son truc à Phiphi … En deuse, Vincent a bien tenté le maquillage mais le coup du trop bon, trop con, ça n’a pas bien marché avec les sénateurs. Pour l’ensemble des autres personnages principaux, il fait quasiment la totale, notre faiseur d’émissions de télé, de présentateurs maison, et de présidentiable idéologue itou. Il va parfois un peu vite en besogne le bougre. Voilà quelques jours, devant une commission sénatoriale donc, il a annoncé qu’il n’était pour rien dans tout le bazar ambiant. Il a tout de même avoué que « quand on a recruté Zemmour, personne ne pensait qu’il allait être président ». Comme quoi Vincent ne le sait peut-être pas mais il existe probablement une filiation cachée entre lui et Madame Irma, la voyante de la Foire du Trône, cousine de Marcel Campion.
Après une relecture attentive, on trouverait bien quelques modifs à faire. On pourrait s’exempter du « Nous vivons sous un prince ennemi de la fraude. Un prince dont les yeux se font jour dans les cœurs, et que ne peut tromper tout l’art des imposteurs. D’un fin discernement sa grande âme pourvue, sur les choses toujours jette une droite vue. Chez elle jamais rien ne surprend trop d’accès, et sa ferme raison ne tombe en nul excès. » Quoique, la flagornerie est éternelle. Comme les diamants, Ian ?

Fabrice Simoes