Un séminaire consacré à la lutte contre la discrimination à l’embauche a rassemblé à Châteauroux des chefs d’entreprises et directeurs de ressources humaines. Ils se sont penchés en particulier sur l’entretien d’embauche.
« Peut-on exiger dans une annonce que la (ou le) candidat(e) joigne une photo.
Est-il légal de demander Etes vous mariée ? » On peut être animé des meilleurs intentions et se mettre en contradiction avec la loi. C’est à cette conclusion que sont arrivés les professionnels de l’emploi rassemblés par la Direccte Centre lors d’un séminaire consacré à la lutte contre la discrimination. Au cours des ateliers ils se sont confrontés à un « quizz discriminations » et certains ont découvert que dans le cadre d’une plainte pour discrimination c’était à l’employeur de produire les éléments démontrant qu’il n’y avait pas eu de discrimination. Qu’on ne pouvait pas demander à une candidate à l’embauche « Vous ne voyez pas d’inconvénient à être la seule femme de l’équipe » et qu’une entreprise ne peut pas imposer de restrictions en matière de tenue vestimentaire à tous ses salariés.
En fait le constat qui s’est dégagé de cette matinée de travail c’est que des employeurs (sauf bien sûr les grandes entreprises qui disposent d’un gros service relations humaines) et plus encore des candidats à l’embauche, ne connaissent pas les règles. Sachez qu’il existe par exemple vingt-trois critères interdits par la loi. On pense au sexe, au handicap, à l’âge mais pas immédiatement à l’orientation sexuelle ou à la capacité de s’exprimer dans une langue autre que le français, ainsi qu’aux opinions politiques.
Un entretien bien préparé
Du côté des recruteurs on a convenu que la meilleure manière d’éviter les dérapages, lors de l’entretien d’embauche, était de travailler sur un schéma pré-écrit (que l’on conservera et qui pourra servir de preuve si le candidat non retenu porte plainte pour discrimination) et, dans l’idéal de mener l’entretien à deux. Par ailleurs la fiche de poste proposée dans l’annonce doit être suffisamment détaillée pour qu’il ne soit pas utile de poser les questions complémentaires qui puissent vous mettre en porte à faux par rapport aux fameux vingt-trois critères interdits par la loi. Si le postulant a tous les éléments en main il peut faire son choix en toute connaissance de cause.
La lutte contre les discriminations ne doit pas être simplement une contrainte supplémentaire pour les recruteurs. Elle peut éviter aux entreprises la sous utilisation de potentiels humains élevés. Elle peut être utile à l’économie en facilitant l’accès d’une partie de la population aux postes qualifiés. Favorable aussi aux finances publiques : une population en emploi plus faible et d’une productivité moins élevée, génère une production inférieure donc de moindres recettes et davantage de dépenses publiques. Par ailleurs l’insertion par l’emploi conditionne l’intégration sociale.
Un gros travail d’information
Le plus gros du travail reste néanmoins à faire du côté des demandeurs d’emploi. Une enquête menée en région Centre Val de Loire a montré que 53 % des personnes interrogées ne se sentent pas suffisamment informées de leurs droits, que 71 % ne savent pas à qui s’adresser en cas de discriminations. Autant d’éléments qui nourrissent un malaise social. 38 % pensent d’ailleurs qu’ils n’ont pas les mêmes chances que les autres. Une autre enquête menée auprès d’élèves de CFA a donné des résultats préoccupants :
19 % des élèves pensent qu’il y a de forts risques qu’ils aient à faire face à des situations de discriminations lors de leur apprentissage en entreprise. 53 % ne solliciteraient pas le CFA s’ils étaient victimes de discrimination et 16 % n’en parleraient à personne.
Reste à savoir ce qui est de l’ordre du ressenti et de la situation objective. Mais subir une inégalité, c’est déjà être discriminé.
P.B.