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La France en feu, quel cirque

Entre deux dates de manifestants hurlants, une poésie urbaine maintient ce rythme à force de graffitis et de papiers collés sur le mobilier public, apposés au-dessus pour certains de poubelles dans une ville moyenne, Blois, déclamant : « 49-3, c’est caca », ou encore « la Macronie en feu ». Un printemps fleuri, n’est-ce pas. À moins d’avoir vécu dans une grotte ou de venir d’une autre planète, personne n’ignore à quoi renvoient ces laconiques vers modernes. Comme si, d’un coup d’un seul, les oeillères de déni, à cause d’une goutte sociale de trop, s’étaient envolées, et la lumière fut sur l’arrogance flamboyante d’un Président de la République Macron dont la méthode est, hélas, bien connue de toutes et tous depuis son premier quinquennat. À l’approche des fêtes pascales, toujours aucun œuf surprise ici. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il faille se résigner. Et là, le nid contestataire tient bon, même si les violences et dégradations sont honteuses. Si le chêne Élysée ne plie pas, les roseaux des manifestations ne rompent pas. «Une idée devient une force lorsqu’elle s’empare des masses, » écrivait Karl Marx, théoricien de la révolution pour lequel en son temps, la lutte des classes était le moteur de l’Histoire. Peut-être que d’ici quelques semaines, sera révélé le vrai visage de ce moteur français. Ce qu’il naîtra vraiment sous ce capot. Pendant que la maison France brûle et qu’une onzième journée contre la réforme des retraites se profile le 6 avril, tout le monde tourne le dos à une dixième vague de Covid. Plus personne ne semble s’offusquer, ou quasi, des cirques qui reviennent dans les villes en compagnie d’animaux sauvages, puisque la loi contre la maltraitance animale, avec une application, progressive, ne sera réellement effective pour les établissements itinérants de toute façon qu’en 2028. Également, personne ne s’émeut plus vraiment du conflit Ukraine-Russie. Alors, derrière ces manifestations, des arbres qui cachent bien des forêts ? Personne non plus n’accorde à nouveau de confiance aux journalistes, ces supposés suppôts du pouvoir en place. Il n’est même pas sûr que ces sujets d’éternelles luttes permettent de mieux faire vendre la presse écrite. En sus, qui a vraiment prêté attention au tout dernier rapport climatique du GIEC ? On en oublierait quasiment les lapins, poules et oeufs en chocolat de Pâques. De toutes les manières, avec l’inflation qu’il impossible d’oublier, tellement elle est serinée à longueurs de journées, entre deux scénarios de drama queen du ministre Bruno Le Maire ou de l’homme d’affaires Michel-Édouard Leclerc, les plaisirs s’amenuisent. Il y a quelques mois, nous pouvions nous dire que nous avions de la chance d’être végétarienne, mais tout flambe maintenant. À la caisse, comme dans les cortèges. Cela aussi paraît parti pour durer. Selon un autre ministre, de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, depuis Blois, « le meilleur prix n’est pas le plus bas ou le moins cher, mais celui qui rémunère l’agriculteur ». D’après un énième ministre, des transports, Clément Beaune, les publicités lumineuses s’éteindront chaque soir quand les gares, métros et aéroports, notamment, seront fermés. Un récent tweet d’un ixième ministre, de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’écriait fin mars : “Que s’est-il passé à gauche pour qu’on oublie Clémenceau, Mitterrand, Chevènement, Joxe, Cazeneuve, Valls ?” Sans doute. De quoi rassurer ? Que s’est-il passé en effet. Un cirque d’injonctions contradictoires, depuis au moins le virus Covid et l’année 2020, et la France se transforme en feu, et on en crève. Un cirque où personne n’a tort ni raison, mais avec sur la piste, toujours les mêmes dindons de la farce qui doivent sauter dans le même cerceau en feu. Si nous ajoutons les méga-bassines à Sainte-Soline dans ce bocal social… S’il semble falloir économiser en 2023 sur tout, la protestation dans les rues, elle, ne s’annonce pas pour le moment au rabais.