On a beau savoir qui était Robespierre, ce livre est édifiant et utile. Quand Robespierre a écrit « La mort est le commencement de l’immortalité », bien avant de mourir, il ne croyait pas si bien dire.
Le livre commence avec les réflexions du chauffeur de la charrette pour l’échafaud. Il compte les condamnés attribués à Robespierre, le chat-tigre, comme l’appelait ses collègues : « Il avait du chat l’immobilité frémissante à l’approche de sa proie, du tigre, l’impassible cruauté du moment de la mise à mort ». Pendant la terreur, Les femmes portaient des guillotines en pendentif pour mieux convaincre de leur patriotisme et « voler, piller, corrompre était devenu aussi fréquent que respirer… » Il n’y eut jamais autant de dénonciations et d’arrestations.
Comment la vie d’un homme le plus écouté de la Révolution peut basculer en trois jours, c’est le thème de ce livre. On voit Maximilien manger avec frugalité, surtout des oranges, penser beaucoup, s’habiller comme un aristocrate et se laisser aimer en secret par Eléonore Duplay, la fille de son logeur, sans même la regarder.
Pressentait-il que la création d’un être suprême avec la fête somptueuse qu’il avait initié précipiterait sa chute ? Qui pouvait comprendre que les prêtres étaient déportés, les églises pillées pendant que Robespierre créait une nouvelle religion ?
Après trois semaines de silence, la prise de parole de Robespierre est attendue à la Convention ce 8 thermidor ( 26 juillet) 1794. Ses mots savamment pesés sonnent juste. Pour la première fois Robespierre laisse entendre que le comité de salut public est allé trop loin. « Insultes, menaces, hurlements de bêtes, » y répondent .
Et l’on suit les complots des uns et des autres, les Tallien, Barrère, Henriot, Barras, collot, Fouquet –Tinville, tandis que Sanson affute sa guillotine. On voit David peindre ce qu’il voit, Couthon le paralytique, Saint Just le silencieux suivre Robespierre jusqu’à la chute, accompagné fidèlement par le frère de l’Incorruptible le jeune Robespierre appelé « Bonbon ».
Après sa tentative de suicide ratée, la mâchoire fracassée on traine Robespierre le 28 Juillet 1794 jusqu’à la guillotine sous l’acclamation du peuple qui ne veut rien rater.
En ces années de violences et de peur que nous vivons, cette lecture prend tout son sens : un mot, une phrase, un discours ou un geste peuvent déclencher une situation dramatique voire irréversible et si vite qu’on n’a pas le temps d’y réfléchir. Sans les réseaux Sociaux, trois jours seulement ont suffi à Robespierre pour chuter. Du samedi au lundi. Et rien ne pouvait laisser présager ce renversement une semaine plus tôt. Ce livre très documenté et bien écrit éclaire d’un jour contemporain la fragilité de tout pouvoir.
Marieke Aucante.
La chute Les derniers jours de Robespierre de Jacques Ravenne.
Editions Perrin Plon