Le journaliste, écrivain et homme de lettres du Val de Loire, dont la famille est propriétaire du Clos-Lucé à Amboise depuis 1855, s’est éteint à l’âge de 69 ans dans la nuit du 7 août sur une petite route de Normandie. Il a été inhumé le 14 août en Indre-et-Loire. Nous l’avions interviewé il y a deux ans.
Le choc fut assourdissant en ouvrant la page de notre navigateur Internet. Un titre, « la littérature française en deuil », et surtout, une photo qui nous assomme. Été meurtrier. Gonzague Saint Bris n’est plus. À ce moment précis, les souvenirs nous ont frappé de plein fouet. C’était en mai 2015. Nous avions eu un entretien fort agréable avec cette personnalité, d’abord par téléphone. « Je suis pressé, je vais à une cérémonie de remise de prix à Paris, » nous avait-il gentiment signalé, puis le jeu des questions-réponses s’était ainsi enclenché, en toute simplicité. Il nous avait alors succinctement raconté « Gilbert-du-Motier, marquis de la Fayette, orphelin de père, fut milliardaire à 14 ans, marié à 16 ans à la femme de sa vie, Adrienne de Noailles, major général dans l’armée des États-Unis à 19 ans. » Gonzague Saint Bris venait aussi de réaliser une vingtaine de clips, des courts documentaires, sur « les châteaux qui font la France » avec un drone. Il nous avait alors parlé de Chaumont-sur-Loire, avait cité Madame de Staël. Et surtout, s’était décrit de cette manière : « en France, quand on fait des livres, des disques et des films, on dit que vous êtes un touche-à-tout. Aux États-Unis, vous êtes un « Renaissance Man ». Ce dernier terme me plaît assez car je suis un homme de la Renaissance et pluridisciplinaire. » La deuxième rencontre avec Gonzague Saint Bris a lieu, toujours en 2015, quelques jours plus tard, en mai à la Maison de la Magie. L’homme y avait donné une conférence sur la Fayette, sur invitation de l’association France États-Unis. Il avait raconté de façon très théâtrale et enjouée cette partie de l’Histoire. Avant son entrée en scène, il s’était assis près de nous en engageant naturellement la conversation, il rentrait d’Italie. Rien à voir avec notre quotidien mais il avait tenu à nous demander de lui décrire notre journée. Après l’exposé, il était revenu nous saluer, ajoutant en nous regardant droit dans les yeux : « désolé tout à l’heure, j’ai mélangé mes feuilles, vous étiez devant, ça m’a troublé. » Il était ainsi Gonzague Saint Bris, charmeur, sans prétention, et son souvenir impérissable restera gravé dans toutes les mémoires.
Émilie Rencien
