Un boulanger, et peut-être deux bientôt sur une même commune. Une bonne nouvelle ? Pas pour tout le monde.
Un village rural sans commerces de proximité perd son âme. A l’heure où ces petites boutiques commerçantes se réduisent parfois comme peau de chagrin au profit de grosses structures commerciales périphériques, ce n’est pas le cas à Gièvres. Vincent Desgardin tient la boulangerie de la commune depuis cinq ans, épaulé par sa compagne. Tout pourrait aller pour le mieux, oui mais voilà, l’installation possible prochainement d’un deuxième boulanger à quelques pas du premier fournil crispe l’artisan concerné. « La rumeur enflait depuis plusieurs mois; la municipalité en place avait le projet de regrouper trois commerces dans un local, dont une boulangerie, » relate Vincent Desgardin dont le père est lui-même boulanger. « Le maire, Robert Mougne, m’a reçu en rendez-vous le 14 décembre 2018, me confirmant ce dossier, dans un souhait de pérenniser les commerces. J’ai racheté il y a cinq ans le fond de commerce sans aide, j’ai permis de réouvrir une boulangerie fermée, et je lui ai expliqué que je ne pouvais pas financièrement déménager, ayant encore un prêt bancaire lié à mon activité professionnelle sur le dos. Je lui ai donc fait une proposition pour laquelle j’ai reçu réponse ce mois-ci par courrier prenant acte de mon refus de m’installer dans le nouveau local. » Où est le problème, alors ? Le hic pour le boulanger, c’est qu’un autre artisan pourrait prendre place sur le nouveau site. «Ce qui ferait deux boulangers à Gièvres et deux, ce n’est pas viable sur une petite commune, c’est mathématique ! Soit je me surendette pour me déplacer, soit je meurs et sans doute que c’est la mort assurée pour les deux en prime… » Vincent Desgardin se déclare encore ouvert à discuter avec la mairie, annonçant le lancement incessamment sous peu d’une pétition. Ce à quoi répond l’édile, Robert Mougne. « Je ne suis pas fermé non plus. J’ai reçu ce boulanger le 14 décembre 2018, il nous a expliqué son refus et nous a proposé de reprendre son fonds de commerce. On réfléchit car c’est beaucoup d’argent pour la commune. Il n’y a pas de crise. Le projet de regroupement de trois commerces, sur la route de Chabris-Romorantin, sur 2 600 m2, reste d’actualité. L’ouvrier qui reprend la boucherie de son patron est d’accord pour s’y implanter, l’épicerie aussi. Pour la troisième cellule, le premier professionnel qui viendra l’aura. Nous travaillons avec un architecte, et mi-juin, ce sera le moment de l’archéologie préventive. Et j’insiste : le dialogue n’est pas rompu.» Il ne reste plus qu’à souhaiter que les deux parties trouvent un terrain d’entente satisfaisant, plutôt que de virer vers un scénario « pas de pitié pour les croissants »…
É. Rencien