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François BARBEROUSSE un écrivain solognot, un temps oublié

Au printemps 2012 les éditions CPE éditaient un recueil de nouvelles rustiques « Epis de Glanes » qui nous dévoilaient des visages oubliés de la Sologne comme l’arrivée des Prussiens à Pierrefitte ou les meneux de loups. Ce livre avait été écrit dans les années 30 par François Barberousse. Cet auteur que les solognots ont oublié est né en 1900 à Brinon-sur-Sauldre. Cet écrivain français fut un des auteurs phares de la collection NRF de Gallimard de 1935 à 1938. On lui promettait un brillant avenir. Contre toute attente, ce héros de la Résistance décida irrémédiablement de renoncer à l’écriture. Son troisième roman vient de sortir de l’oubli, publié 73 ans après son écriture.

Le recueil de nouvelles avait attiré l’attention des initiés, des passionnés de la Sologne mystérieuse. Il avait  réalisé un score de ventes conforme à ce que peut réaliser une oeuvre régionaliste.

Le petit-fils de l’écrivain proposa alors à l’éditeur, Christophe Matho un vieux manuscrit oublié. Un livre qui aurait du être publié à la NRF en 1939… Mais le ton a été jugé trop pacifiste par le ministère de la guerre alors que l’auteur était un jeune officier. Les temps n’étaient pus à s’interroger sur les mal faits de la mobilisation ! L’éditeur décida de lancer une nouvelle maison d’édition pour lancer ce roman à l’automne 2012 : « Marivole ». Christophe Matho  avait lancé une impression conforme à ce que peuvent vendre les librairies entre Berry et Orléanais. Or, une semaine après sa sortie, le livre est presque épuisé il du s’empresser de le réimprimer !

Les maquettes du livre diffusé dans les milieux « avertis » avait attiré l’attention, en fait ce sont les librairies de toute la France qui ont commandé Gusse et pas seulement celles de la région.

L’intrigue nous parle de la guerre 1914-1918 qui décime un village entre Sologne et Berry. Le village de Sommerère, ne le cherchez pas sur la carte, il est quelque part entre Pierrefitte et Brinon dans l’imagination de l’auteur ; en écrivant son livre 20 ans après les événements, Barberousse ne pouvait pas planter l’action dans un village réel où les souvenirs de la grande guerre étaient encore vivaces, d’autant plus qu’il s’est probablement inspiré de personnages qui ont vécu dans les villages  Solognots. Des jeunes gens meurent en pleine force de l’âge, des amis, des copains ne sont plus que des croix alignées au cimetière ou de simples noms sur la stèle du monument aux Morts. Pourquoi Gusse s’est-il confié au Glaude lors de sa dernière permission. Comment est-il mort ? À quelle date ? Quelles en sont les vraies raisons ?… François Barberousse nous entraîne dans un village solognot comme beaucoup de villages avec ses gens de la terre qui vivent au rythme des saisons, qui travaillent dur, qui habitent la nature qui les entoure… dans un style sans affectation aucune et une écriture resserrée qui retiennent l’attention. Gusse, le héros du roman, est soldat pendant la Grande Guerre. Pour autant, le roman ne peint en rien la guerre elle-même. Il décrit le désespoir d’un jeune homme qui constate que la communauté paysanne qu’il aimait se délite au fil des années de conflit. Chaque permission est pour lui l’occasion de constater que le monde paysan est profondément blessé dans ses usages, dans ses valeurs. « L’âge d’or » des campagnes françaises (ainsi a-t-on pu nommer la période des années 1880-1900) a bien disparu. Bien qu’éloignée du front, la Sologne et sa ruralité profonde ne sont donc pas à l’abri des changements. Et tout l’art de ce roman est de savoir les peindre avec force et avec tact. Les villes vivent aussi cela. Mais elles bénéficient d’un dynamisme qui masque les mutations sociales et l’émergence de nouvelles mentalités sous les traits d’une modernité qui peut paraître attrayante. Il n’en va pas de même pour les campagnes qui, dès lors, peuvent apparaître comme les grandes perdantes de la guerre.

Il y a, chez Barberousse, du Céline, pour l’écriture, du Hugo pour la clarté, du Zola pour l’étude des personnages, du Claude Michelet, du Vincenot pour le terroir… Il devra rapidement entrer dans le panthéon des grands écrivains de chez nous et sans doute à leur tête. On a d’ailleurs du mal à comprendre comment il a pu être oublié !

Un authentique ventre jaune saura y puiser cette sensibilité particulière que seul un familier des landes et des étangs est apte à apprécier pleinement. C’est que, dans un style d’une grande pureté, Barberousse, plus que tout autre, sait nous faire découvrir la rudesse du monde paysan d’alors et les mystères d’une Sologne qui, pudiquement, ne se dévoile que grâce à la subtilité d’une plume incomparable.

Fils d’un paysan aisé, François Barberousse est né à Brinon-sur-Sauldre en 1900. Nourri de littérature dès son plus jeune âge, il publie « l’Homme Sec » (1935) et « Les jours aux volets clos » (1936) aux éditions Gallimard, deux ouvrages qui rencontrent le succès et font comparer leur auteur à Céline. Ces romans, d’une écriture sans concession, témoignent de la vie rude et de la violence des rapports sociaux dans le monde rural de l’époque. Comme le dit Gérard Boutet dans l’avant-propos « Epis de glane », le recueil de nouvelles publié au printemps 2012 chez CPE : « La scolarité du garçonnet passa par la communale de La Chapelle-d’Angillon, dont l’institutrice était Madame Fournier, la mère de l’auteur du Grand-Meaulnes. Il est tentant d’imaginer François Barberousse, usant ses culottes courtes sur les bancs d’une classe où, douze ans plus tôt, le fils de la maîtresse, Henri Alban, avait usé les siennes. À tout le moins, on relèvera là une troublante coïncidence. L’enseignement de l’école républicaine a éveillé beaucoup de conscience, le fait est indéniable. Toutefois, cela ne fut jamais suffisant pour décider de la vocation d’un écrivain. La principale raison qui lia François Barberousse à l’écriture résulta vraisemblablement de l’intérêt que son père, figure originale, réservait au bonheur de lire. Maître Justin Barberousse, en effet, s’était porté acquéreur de plusieurs « bibliothèques bourgeoises », au gré de successions en déshérence. À la veillée, la maisonnée se rassemblait autour de la lampe à pétrole pour partager, quasi religieusement, la lecture que le patriarche imposait à tous. Le jeune François retira, de ces soirées livresques, un bénéfice considérable. Doté d’une mémoire peu commune, il put ainsi élaborer, selon le témoignage de son petit-fils Pierre Paliard, une « culture buissonnière, faite de passion et de curiosité ». Dans ces ouvrages François Barberousse brosse un tableau réaliste de cette société terrienne dont il était issu.

Personne ne sait vraiment pourquoi le résistant François Barberousse a renoncé à l’écriture après la guerre.  Il est mort en 1979 à Cahuzac, dans le Lot et Garonne.

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