Les «Saint-Hubert» continuent d’exercer la police de la chasse, mais leur mission s’est considérablement élargie, en particulier à la sauvegarde de la biodiversité.
L’uniforme est gris, le pistolet est bien en évidence à la ceinture et l’écusson police sous les insignes du grade de votre interlocuteur ne trompent pas, vous êtes bien en face d‘un agent de police judiciaire. Dernière indication, les chaussures de marche qui précisent son domaine d’évolution: la nature. Il est agent de l’office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).
Gérald Perreau est chef du service départemental du Cher de l’ONCFS. Il est à la tête d’un service de onze agents, pour 12.500 chasseurs. « Autrefois le service a compté 20 agents , il y avait alors 25.000 chasseurs, mais la police de la chasse n’est plus notre unique occupation, ça ne représente plus que 40% de notre activité ».
Les collègues de Gérald Perreau ne traquent plus uniquement le braconnier, mais aussi le conducteur de quad qui laboure les espaces sensibles à grands coups d’accélérateur, ou les tortues de Floride que des parents ont acheté sans penser que le bébé tortue atteindrait trois à cinq kilos, et qu’ils relâchent dans la nature provoquant des catastrophes écologiques. Plus statique encore, les trafiquants de bulbes de perce neige ou de jonquilles, (un réseau de revente passe par la Hollande) sont également dans leur collimateur.
Sur Le bon coin pendant leurs heures de travail
Mais les agents de l’ONCFS n’ont pas seulement un pistolet à la ceinture. Ils ont aussi un ordinateur sur leur bureau, qui leur permet de traquer ceux qui se livrent au trafic d’animaux. «Le Bon Coin peut-être une base de départ. Mais les trafiquants de méfient et nous allons les pister sur d’autres sites spécialisés, assure Gérald Perreau. Nous avons dans notre service des techniciens particulièrement pointus, en informatique mais aussi des scientifiques de haut niveau qui peuvent apporter un appui technique aux administrations, collectivités territoriales, gestionnaires et aménageurs du territoire.»
Les résultats des derniers concours d’admission sont révélateurs : pour une quarantaine de postes à pourvoir il y avait environ quatre mille candidats sur la ligne de départ et à l’arrivée on trouve chez les admis : 28% de Bac+ 2, 8% Bac + 3, 16% Bac + 4, 32% bac + 5 et au delà ! «Il faut veiller à ce que le bagage scientifique ne fasse pas oublier le terrain, tempère le chef de service, mais en règle générale c’est un métier que l’on fait par passion ». Quelle que soit la technologie dont vous disposez, lorsque vous êtes en planque par -5°, vous avez froid.
Rendre le braconnage supportable
Les agents de l’ONCFS n’ont pas la prétention d’éliminer le braconnage. «Il s’agit de le rendre supportable, d’éviter que des braconniers itinérants réduisent à néant un travail cynégétique en quelques heures ». Mais Gérald Perreau dénonce ce qu’il appelle le syndrome de Vichy, «dénoncer des délits ce n’est pas de la délation, mais du civisme. Sans témoignage signé, on ne peut pas démarrer une procédure». Et désormais, avec les nouveaux ordinateurs portables, on peut témoigner chez soi et signer sur l’écran.
Leur rôle de régulateurs des espèces animales envahissantes se heurtent parfois à des intérêts économiques. Sur des territoires où les sangliers sont manifestement en surnombre, le prix de l’action de chasse ne peut être justifié que si les chasseurs sont sûrs de faire un tableau. La régulation n’a pourtant pas que des désavantages: on peut désormais tirer la Bernache du Canada, cette oie que l’on trouve dans le nord de la Sologne est passée «chassable».
Gérald Perreau et ses hommes étaient bien entendu sur le terrain dimanche dernier pour l’ouverture, mais ils attendent surtout l’ouverture du lièvre, le 12 octobre, pour retrouver un maximum de chasseurs sur le terrain. «En fait notre pic d’activité pour la police de la chasse, c’est novembre-décembre, mais 365 jours sur 365 nous avons au moins un agent sur le terrain et nous intervenons de jour comme de nuit ».
Pierre Belsoeur
PORTAIT Gerald Perreau
Le patron du service de l’ONCSF du Cher est un homme heureux dans des locaux vastes, bien équipés et flambant neufs. Ceux de ses collègues de l’office national de l’eau et des milieux aquatiques sont sur le même plateau, si bien que les deux services peuvent se renforcer mutuellement quand le besoin s’en fait sentir. « Nous faisons des envieux c’est certain.» Gérald Perreau fait partie de la première promotion de l’ONCSF, en 1978. Affecté dans le Cher il y restera jusqu’en 1990, il le quittera pour devenir chef de brigade dans le Cantal, puis chef de service dans les Deux Sèvres avant de retrouver le même poste, dans le Cher, trois ans plus tard. «J’ai 58 ans, mais j’espère bien poursuivre ma mission jusqu’à 65 ans, en restant dans le département de préférence, même si mes fonctions évoluent. Plus qu’un métier, c’est une passion et j’ai autour de moi une équipe formidable.»
Gerald Perreau exerce sans états d’âme sa mission de police de la chasse, mais reconnaît avoir déjà croisé des Raboliot qui l’ont séduit par leur connaissance et leur respect de la nature, même si leurs méthodes de chasse étaient illégales. «Le plus attachant, je l’ai quand même fait tomber pour un an ferme. Il faut dire qu’il n’en était pas à son coup d’essai.»
Les missions de l’ONCFS
Créé en 1972 l’office nationale de la chasse et de la faune sauvage est sous la double tutelle du ministère de l’environnement et de l’agriculture. C’est un établissement public expert de référence en matière de gestion de la faune sauvage et de ses habitats et au service de la biodiversité
- Il est chargé de la surveillance des territoires et de la police de la chasse.
- Des études et recherches sur la faune sauvage et ses habitats
- Vient en appui technique et conseille les administrations, collectivités territoriales et les gestionnaires et aménageurs de territoires
- Supervise l’évolution de la pratique de la chasse selon les principes du développement durable et la mise au point de pratiques de gestion des territoires ruraux respectueuses de l’environnement.
- Organise l’examen du permis de chasse.
- Edite la revue technique et juridique trimestrielle: Faune Sauvage.