A l’ombre du clocher de l’abbaye de Déols, à deux pas du jardin public de Belle-Isle, on chemine dans une nature sauvage, entretenue par des chevaux camarguais. Bienvenue aux Chénevières.
C’est un petit chemin, qui ne sent pas la noisette comme celui que chantait Mireille, mais qui permet de faire le tour d’un espace étonnant. L’écoparc des Chénevières, comme le reste des prairies de Belle-Isle était depuis des siècles un espace marécageux, traversé par la Ringoire, petite rivière qui vient se jeter dans l’Indre, que l’on a domestiqué en creusant des fossés afin de constituer des lopins de terre où l’on cultivait le chanvre. Ces terrains inondables redevinrent prairies naturelles où pâturaient les bovins jusqu’en 1950 et no mans’land lorsque l’élevage disparut. Tout ceci, et bien d’autres choses encore à propos de la faune et la flore de cette zone humide, vous le découvrirez au fil de votre promenade puisque des panneaux colorés viennent d’être mis en place par la ville de Déols, avec le concours du Département. Des panneaux, mais des jeux d’enfants rustiques également pour un endroit de plus en plus visité, en particulier depuis qu’une passerelle permet d’enjamber l’Indre lorsque l’on vient du parc de Belle-Isle.
Un guide nommé Patrick Biaunier
Mais pour mieux connaître cet endroit bucolique, rien de tel que de le parcourir aux côtés de Patrick Biaunier. Sa silhouette rappelle un peu celle du célèbre Monsieur Hulot de Jacques Tati, et s’il raconte en poète les lieux sur lesquels il veille, le conservateur de l’Ecoparc a bien les pieds sur cette terre de vallée. Les deux pieds d’ailleurs car s’il est conservateur pour la partie qui appartient au conservatoire du patrimoine, il est aussi le président de l’Association des Chénevière chargée de gérer la propriété de la ville de Déols.
« Les acquisitions pour constituer l’écoparc ont commencé en 1991. Toutes se sont faites à l’amiable et c’est en 1993 que sont arrivés les premiers chevaux camarguais. Deux juments d’abord, puis un étalon en 1995. Depuis 1997, nous enregistrions deux naissances par an et vingt-huit poulains sont nés dans le parc, ils étaient vendus lorsqu’ils avaient l’âge d’être séparés de leur mère. Le mâle est mort de problèmes intestinaux, nous avons conservé quatre chevaux. Depuis peu, deux Konik Polski, descendants des anciens chevaux sauvages polonais des Tarpans, dont la race a été reconstituée par des généticiens, sont venus les rejoindre. A eux six, ils disposent de douze hectares qu’ils sont chargés d’entretenir. Ils rasent les pelouses façons tondeuses anglaises pendant la période de la pousse de l’herbe et l’hiver, ils écorcent les frênes et éliminent les pousses de saules, ils sont capables de couper des branches basses de la taille du pouce. Ils n’ont pas besoin d’alimentation complémentaire puisqu’ils disposent du fourrage sur pieds. Si l’on voulait avoir une pression sur les frênes et les saules il faudrait doubler le cheptel, mais l’hiver ce serait ingérable. Nous devons donc intervenir à minima, toutefois les chevaux remplissent bien leur mission d’entretien de l’espace. »
Le garde-manger de la pie grièche
Il y a aussi eu des moutons sur le site. Depuis quelques années la ville de Déols a fait l’acquisition d’un couple spectaculaire d’Higlands Cattle qui disposent d’un enclos de 4 ha à la végétation beaucoup moins soigneusement entretenue que celle de leurs voisins.
L’écoparc est aussi un espace ornithologique « le râle des genêts a été observé un temps dans les prairies non fauchées, mais cette espèce de migrateurs, cousins de la poule d’eau, est en voie de disparition, on n’en observe plus que dans l’estuaire de la Loire. En revanche, entre la mi mai et la mi août nous accueillons la Pie grièche écorcheur, un passereau africain qui a la particularité de se servir des épines de prunelier comme garde-manger en y empalant ses proies. Nous en avons bagués et constatons que les mêmes individus reviennent chaque année nicher exactement au même endroit que l’année précédente ! » Bonne promenade.
Pierre Belsoeur
Travaux au plan d’eau de Belle-Isle
Les zones humides retiennent décidément l’attention des services de l’agglomération. Après l’ancienne peupleraie de la vallée d’Ebbes, c’est au tour du lac de Belle-Isle de faire l’objet d’un important aménagement. Chaque été le développement d’algues microscopiques, les cyanobactéries, perturbe la qualité de l’eau, entrainant l’interdiction de la baignade. Une première tentative d’épuration a été mise en place avec l’installation d’un tapis végétalisé flottant sur le lac. La solution n’est pas à l’échelle du mal et les services techniques savaient pertinemment qu’il faudrait intervenir sur l’îlot central.
Le chantier vient de s’ouvrir. Il consistera à abattre la totalité des arbres qui s’y sont développés, de faire passer sa surface de 4.500 à 1800 m2 en ne conservant qu’une partie faiblement émergée qui sera plantée de végétaux destinés à filtrer l’eau. Un gué provisoire sera mis en place pour permettre aux engins de chantier de rejoindre l’ile. Les éléments de ce gué seront utilisés pour réaménager les berges en pente douce dans les endroits où elles ont été abîmées par l’érosion. Un chantier de 119.000 € qui changera radicalement la physionomie du lac et rendra la baignade possible, même en période de grande chaleur. Les cyanobactéries, comme les baigneurs, adorent l’eau chauffée par le soleil.