Chère rentrée. La vie chère. Davantage que des litotes de café du commerce ou de supermarché, des maximes serinées toute la sainte journée. Le carburant qui augmente de dix centimes, le Covid qui ressurgit… Comme si c’étaient faits nouveaux. Même sur la plage cet été, nous étions cerné(e)s. Il y en a assez de ces informations négatives. Bouclez votre ceinture, cela n’a pas fini de tanguer, même avec un stylo et des cahiers Licorne. Alors, quelle parade ? Éteindre radio, tv, et lire le dernier livre de Nicolas Sarkozy ? Non, du vrai divertissement, positif, sans prise de tête. Où trouver encore des paillettes ? Et pourquoi pas, mettre du rose dans notre vie ! Par exemple, en allant au cinéma : si les brunes ne comptent pas pour des prunes, les blondes iconiques de notre jeunesse peuvent créer la surprise… Eh oui, il nous fallait voir ce long métrage “Barbie” avec Margot Robbie et Ryan Gosling, pour ne pas mourir idiote. Ce carton, ce phénomène : rien qu’en France, depuis sa sortie en juillet, il a déjà enregistré plus de cinq millions d’entrées. Ce film, signé Greta Gerwig, fait vendre aussi à l’envi des figurines Mattel et des shorts collector Zara. Derrière ce business, voit-on la vie en “pink” au bout de près de deux heures d’opération marketing sur grand écran ? Tout y est donc rose (en français), également glamour, sexy, entre escarpins hauts, fascinantes robes tailleur (et pas toutes roses !), chevaux et Chevrolet, cheveux décolorés et torses nus sculptés. Mais, pour notre part, exceptés le joli grain de voix de Ryan Gosling en Ken chanteur, le tube de Dua Lipa, “Dance the night”, plus une tenue à frange et chapeau western nous remémorant notre Barbie Sun Charm d’enfant, nous nous sommes un peu ennuyées dans ce microcosme de plastiques à la fois enchanté et déjanté, devant ce scénario distribué par Warner Bros, qui aurait pu être écrit par Walt Disney (même pas un baiser entre Barbie et Ken…). Quelques gags à la Brice de Nice et stéréotypes américains, des passages de comédie musicale. Oui, la marque Mattel sait s’y moquer d’elle-même. Et si “Barbie Land” permet de réviser ses classiques de petite fille (tiens, cette collection a existé ?), ce pays imaginaire distille des messages engagés en écho, nichés pêle-mêle dans une trame chargée, un humour niais et une bagatelle assumée : féminisme et Constitution, pouvoir des femmes et pyramide sociétale inversée, patriarcat et Gouvernement, tolérance de la différence et de l’homophobie, amour à sens unique et relations sans engagement, et caetera. Un militantisme cacophonie, servi en millefeuilles; la bande-annonce laissait entrevoir moins de gnan-gnan. Dommage. Allez, fini de jouer à la poupée mannequin, il faut retourner au bureau, vers des sujets moins ludiques : le(s) rose(s) cette fois du campus d’été du Parti Socialiste de retour à Blois ; le convoi de l’eau, sous un dôme de chaleur, à Blois, Mer et Orléans; sans oublier les élections sénatoriales qui planteront peut-être quelques épines. S’il avait fallu être sérieuse… Nous aurions gardé notre première idée, celle d’offrir à la Sologne, plutôt amatrice de gibiers, via un billet tout entier, après un précédent sur les blaireaux, un moment “Happy Vore”. Et ce n’est pas un vocabulaire Barbiesque ! Il s’agit d’une entreprise créée par deux amis, Guillaume Dubois et Cédric Meston; le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a visité en mai leur usine établie dans le Centre-Val de Loire, dans le Loiret, à Chevilly. “Happy Vore”, ce sont déjà quinze références telles que salami, chorizo, nuggets, steaks, saveurs de la mer ! Mais sans tuer d’animaux. Grâce à des protéines végétales transformées, des arômes naturels, etc. Pourtant, cela ressemble étrangement à, et sur l’étiquette, parfois, une mention “produit congelé, ne pas recongeler”… Pour créer un pont, nous ignorons si Barbie 2023 est vegan mais notre palais, bien que végétarien, ne perçoit pas lui non plus toujours son assiette en rose et nous aurions plombé l’ambiance en attaquant d’emblée la reprise de nos billets avec ce type de sujets… Barbie, qui est celle qu’elle veut être, aura eu la vertu d’insuffler des minutes de légèreté à la fin de cet été. D’ailleurs, une fois dans le grand bain d’une réalité moins rosée, force est de constater que la couleur de cette rentrée, incertaine, demeure à écrire. Nous aurons tenté !
Émilie Rencien