Claude Mazanec annonce, environ, 609.120 heures au compteur de la vie, quand on lui demande son âge. «Pour les minutes, c’est simple : il suffit de multiplier par 60 et ensuite, encore, par 60, pour les secondes… » explique-t-il en souriant, malicieusement, entre deux tic tac puis quelques sonneries harmonieuses. Et il travaille depuis, environ 475.200 heures, y compris jours fériés et de repos, puisque, comme bon nombre d’artisans, il a le «malheur» d’habiter tout près de son atelier qui jouxte sa salle à manger.
Sans nous tromper, Claude Mazanec serait bien le dernier horloger exerçant encore, à Blois, ce métier en Loir-et-Cher…, au rythme des dizaines d’horloges et carillons qui l’entourent dans son repaire où il est déconseillé de se trouver au moment de ce que le métier appelle les heures rondes (9, 10, 11 heures…etc).
Dans le quartier de La Quinière où il s’est installé, il y a 40 ans (je vous laisse calculer les jours et heures…), rue Dorgelès, l’homme, avec sa blouse blanche et ses lunettes, quand il ne porte pas monocle, ressemble, sans la moustache, à Gepetto, le père de Pinocchio…, avec sa bonhomie et son mode philosophique de vie.
Claude Mazanec, membre de la cinquième génération d’horlogers arrivés de Bohême à Paris en 1927, est heureux de savoir que la sixième, composée de son fils Mathieu, et de son neveu, Thierry, perpétue la tradition et le savoir-faire du travail manuel, de précision et de patience, à l’heure où tout va vite, trop vite.
«Même si le métier n’a pas, ou peu, d’avenir dans la réparation des montres très et trop modernes qu’il vaut mieux renouveler que faire réparer, il y a, encore, par bonheur, des pièces de collection dans le monde entier à restaurer. J’ai, en souvenir, une horloge ayant appartenu à Mme de Montpensier, une cage à oiseau siffleur, démontée, nettoyée, réparée avec la confection de certaines pièces, ici, en atelier, car introuvables, et qui est repartie pimpante et rajeunie. Je me suis penché, aussi, sur des pendules Renaissance, dites Habsbourg, qui dataient de 1624. Et il y a quelques bijoux qui m’ont été confiés avant des grandes ventes annuelles à Cheverny, et à Tours, maintenant. De plus, dans certains établissements de La République et de grands châteaux du Val de Loire, je m’occupe de la maintenance d’autres joyaux vénérables, mais en parfait état de fonctionnement… Je continue à travailler avec les outils de mon grand-père Vaclav, le premier arrivé en France, avec son frère, et légués par mon père. Après Paris, la famille s’est installée en Berry… et moi, en Blaisois depuis quatre décennies à mon compte, après un passage à Paris, en Suisse, et chez Cartier à Blois».
On dévie un peu de notre visite qui, au départ, portait sur des conseils à retenir à la veille de l’arrivée de l’heure d’été, en ce dernier week-end de mars….
«Dans la nuit du 25 au 26 mars, il faudra, pour les montres, pendules, horloges… traditionnelles, avancer les aiguilles d’une heure. En principe, il n’y a aucun risque pour le mécanisme, à condition d’y aller très doucement. Le plus dangereux se passera à l’heure d’hiver, avec un recul d’une heure. Là, la prudence joue, avant tout, car il ne faudra, surtout pas, faire revenir les aiguilles en arrière ! Danger ! Car il y a de très gros risques à tout casser. Et il faudra, alors, venir me voir».
Claude Mazanec, même s’il n’y a pas beaucoup d’avenir dans ce métier et des difficultés, pour les quelques horlogers encore installés, à former des apprentis «Ce qui coûte cher, quand même pour l’employeur», encourage les jeunes aimant le travail manuel de précision à s’y lancer. Il y a des écoles à Tours et Rennes et la prochaine bourse horlogère de Mer (www.bourse-horlogere.fr ou bourse.de.mer41@orange.fr), la quatorzième, sous La Halle, les samedi 25 (14-19 heures) et dimanche 26 mars (10 heures-17h30), offrira bon nombre de stands, avec des professionnels qui pourront renseigner les jeunes, pour qui l’entrée est gratuite s’ils sont âgés de moins de 16 ans ou étudiants… Et on pourra y causer de l’heure d’été, instituée, après le choc pétrolier de 1973, dès 1976, en France, et dans 70 autres pays du Monde. On n’avait pas, ou plus, de pétrole, à l’époque, mais on avait des idées plein la tête, avec un président qui, rentrant au petit matin dans son palais, au volant de sa voiture ou de celle d’un ami, heurtait un camion de laitier. C’était quand même plus poétique et plus romantique qu’une histoire de costumes… bien ou mal taillés.
Jules Zérizer
Contacts : Claude Mazanec,
2 allée Roland-Dorgelès,
41000 Blois (02 54 43 72 19).