Châteauroux
Il a connu les grandes heures du CD et s’est installé à Châteauroux pour produire et distribuer les auteurs de la chanson française. A la tête d’EPM il entretient 30 ans de chanson française et promeut de nouveaux auteurs. Portrait.
Oubliez l’image du producteur cigare aux lèvres au bord d’une piscine avec un essaim de jolies filles à ses côtés. Christian de Tarlé vit depuis trente ans dans le monde de la musique. Il a débuté en 1986 chez CBS, qui allait devenir Sony Music, puis est passé chez une autre major, Universal où il était responsable des activités catalogue et compilations jusqu’en 2005.
« C’était l’âge d’or du disque, le CD remplaçait le vinyle, la TVA passait de 33% à 18,6%, et l’on a eu le droit de faire de la pub à la télé. J’ai fait la première pub pour un disque en 1988. Mais je n’étais pas dans le monde du show-biz. Je ne travaillais pas pour les nouveautés. L’espérance de vie d’un album est de dix-huit mois, après on fait du neuf avec du vieux en reprenant des choses existantes et en créant de nouveaux albums. Ça m’a permis de travailler avec de nombreux artistes dont Michel Polnareff. »
Et puis, à partir de 2005 le marché du disque s’est effondré avec l’arrivée du numérique et Christian s’est retrouvé au chômage.
« Depuis 2000, point culminant du CD, le marché a été divisé par 7. Il était impossible de rebondir, alors je suis venu dans l’Indre où j’avais une maison de famille. » Après quelques années passées dans la distribution de produits culturels la passion de la musique française est revenue frapper à sa porte.
« En 2008 j’ai créé Eponyme pour faire de la production de livres audio. Une formule qui marche bien aux Etats-Unis où elle représente 10% du marché du livre. Par contre impossible de faire décoller ce concept en France. Mais un an plus tard j’ai appris que EPM était a vendre. Cette société a été créée par François Dacla, un grand producteur du calibre de Jacques Canetti ou Eddy Barclay qui avait produit Souchon, Voulzy, Johnny Hallyday chez RCA. »
Christian a cassé sa tirelire, frappé à la porte des banquiers, obtenu le soutien d’Initiative Indre et est reparti pour une nouvelle aventure, secondé par Dominique Quéré, indispensable gestionnaire auprès de l’amoureux de la chanson française. « Pourquoi pas EPM à Châteauroux, avec Internet on peut travailler sans forcément rencontrer les gens. Et puis Paris est à deux heures et j’y passe un jour par semaine ».
900 références
Sept ans plus tard EPM est toujours là, commercialisant 80.000 albums à partir des 900 références de son catalogue. Avec des artistes phares comme Georges Chelon, Francesca Solleville, Michèle Bernard, Chanson Plus Bifluorée, Anne Sylvestre évidemment, mais en proposant aussi des coffrets (Georges Brassens, Patachou, Brel, Béart, Francis Lemarque, Charles Aznavour). « Il s’agit de titres antérieurs à 1962 pour lesquels il n’est pas nécessaire de demander d’autorisation. On paye la SACEM qui rétribue l’auteur ou ses ayants droit. Notre cœur de cible est les plus de cinquante ans qui ne trouvent plus en magasin les auteurs de leur jeunesse. En disant cela j’ai le sentiment d’être le dernier des Mohicans, je ne sais pas quand le disque disparaîtra définitivement. En attendant nos ventes se font de trois façons : chez les derniers disquaires, à la fin des concerts – les artistes vendent de plus en plus en direct – et sur catalogue, avec des expéditions depuis Châteauroux. »
A côté de ce rôle de conservateur du patrimoine Christian de Tarlé joue aussi un vrai rôle de producteur. « En général les artistes ont leur studio, leurs musiciens. Mon rôle est donc de prendre en charge ces frais, de faire la maquette d’assurer le pressage des disques et leur diffusion nationale. »
EPM vient de produire un album de Gilbert Montagné « Gilbert chante Bécaud » et celui de Michèle Bernard « Tout’ manières » récompensé par le Grand Prix de l’académie Charles Cros. Il prépare le prochain album de Georges Chelon qui doit sortir en avril. Et puis il a aussi en catalogue « me Re-v’là » l’album de la Quebecoise Geneviève Morissette qui chante son désir d’être l’invitée de Michel Drucker. A quand De Tarlé à vivement dimanche ?
De Tarlé éditeur
Christian de Tarlé n’attend pas la fin du disque sans se préparer un plan B. Il mène parallèlement un travail d’éditeur, de livres pour enfants. Les auteurs ne manquent pas, il y a plein d’illustrateurs en Berry, «mon rêve c’est de les faire fabriquer en France, mais pour le moment c’est inenvisageable étant donné la différence entre les prix de revient en France et en Pologne. » Il est aussi passionné de BD et vient de publier « La Ballade de Rhonda » de deux auteurs indriens : David Verdier pour le texte et Pierre Roux pour les dessins.
Le producteur est un équilibriste et sans passion il ne se risquerait pas sur le fil.
Pierre Belsoeur
contact : epm.detarle@orange.fr
ou www.epmmusique.fr