SIA ? Il ne s’agit pas du tout ici de la chanteuse qui chante dans la langue de Shakespeare avec David Guetta et Amir. Le sigle est plutôt armé : comprenez Système français d’information sur les armes. Un nouveau dispositif numérique présenté à Chambord le 8 février, dans le cadre de la présidence de l’Union européenne par la France.
En plein début de vacances scolaires pour cette partie du territoire hexagonal, certains visiteurs se sont montrés surpris de voir autant de forces de l’ordre et de militaires déployés autour du château de feu François Ier. Autre surprise : deux drapeaux flottaient dans l’air en Loir-et-Cher, le 8 février, au-dessus du porche du monument historique : l’un bleu-blanc-rouge, l’autre bleu étoilé. Toutes ces sorties avaient une explication simple : un colloque européen se tenait ce jour-là, et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, était attendu sur place pour ouvrir l’événement. Finalement, le membre du Gouvernement n’y a pas été accueilli – affairé à d’autres rendez-vous à Paris, TV et d’hommage avec un dépôt de gerbes en mémoire du préfet Erignac – mais le débat a bien eu lieu, lancé à défaut de par Augustin de Romanet, président du conseil d’administration de Chambord, et Jean D’Haussonville, directeur général du Domaine national. Le SIA, qu’est-ce que c’est exactement ? C’est un nouveau système d’information sur les armes, déployé en ligne depuis le 8 février 2022. Selon le ministère, “il pourrait devenir la référence européenne en matière d’encadrement et de contrôle de la détention d’armes à feu. Il garantit ainsi un continuum numérique entre les armuriers, les détenteurs et l’administration.” L’objectif affiché s’avère triple : simplification, dématérialisation et traçabilité. Un dialogue en temps réel permet notamment aux forces de l’ordre, nationales et internationales, de lutter plus efficacement contre les trafics (les armes sont régulièrement liées à la drogue, a-t-il été précisé), le terrorisme et même les violences conjugales. Christian Rodriguez, directeur général de la gendarmerie nationale, a ainsi fait remarquer que les forces de l’ordre peuvent aisément se connecter sur le portail et vérifier si l’individu est propriétaire d’armes ou non, pour ajuster leur intervention.
Expliquer l’intérêt au particulier, chasseur
Concrètement également, sur ce nouveau site (https ://sia.detenteurs.interieur.gouv.fr/), tous les détenteurs d’armes, c’est-à-dire chasseurs, tireurs en club, collectionneurs, amateurs de ball-trap, devront s’y référencer et y créer un compte en ligne pour obtenir un numéro de matricule obligatoire pour acheter, faire réparer ou vendre des armes. Les chasseurs sont les premiers à ouvrir le bal : ils peuvent d’ores et déjà s’y inscrire depuis le 8 février; l’accès à la plateforme SIA se fera progressivement pour les autres détenteurs armés (mars pour les licenciés, juin pour les collectionneurs, etc.). D’après les derniers chiffres, la France dénombre 5 millions d’usagers détenteurs d’armes à feu. Parmi ceux-là, environ 4 millions de détenteurs du permis de chasser. Présent au château de Chambord, pour rappel plus grand parc clos d’Europe, le 8 février, le lobbyiste Thierry Coste, qui murmure souvent à l’oreille du Président Macron, secrétaire général du comité Guillaume Tell (qui a pour vocation de défendre les intérêts des deux millions d’utilisateurs légaux d’armes à feu en France auprès des politiques, ndrl), a martelé. “Nous sommes un pays de Gaulois râleurs si on touche à leurs droits. Notre comité soutient cette réforme SIA donc nous allons encore être pris pour des suppôts du Gouvernement. Alors, nous devons expliquer; Il faut une acceptation sociale pour une politique publique efficace. À nous en parallèle de faire du ménage dans nos rangs.” Sans langue de bois, le député de l’Aude, Alain Peréa, président du groupe chasse à l’Assemblée nationale, a complété. “Il faudrait être fou ou malhonnête pour continuer à faire circuler des armes sans contrôle. Mais le chasseur de base se fout de ce SIA et n’y comprend rien. Nous sommes dans une société où les gens ne sont pas capables de faire la différence entre un fusil et une carabine, et se couchent presque par terre quand ils voient un chasseur ! Nous passons toujours pour suspicieux. Il va falloir expliquer.» L’ensemble des acteurs réunis à Chambord le 8 février (groupement italien des carabiniers pour les enquêtes scientifiques; affaires intérieures du ministère de la justice de Suède; gendarmerie nationale française; police nationale des Pays-Bas, Union française des amateurs d’armes, Fédération des associations de chasse et de conservation de la faune sauvage; Fédération française de tir; etc. Sans oublier Jean Quiquampoix, champion olympique de tir de vitesse!) auront par ailleurs rassurés sur ce SIA, insistant sur le fait que “les honnêtes gens ne seront évidemment pas inquiétés.”
É.R.