Né à Blois le 9 septembre 1908, Bernard Lorjou n’était pas destiné à devenir peintre. Il lui arrivait d’ailleurs de répondre peut-être avec ironie à ceux qui lui demandaient : « Puisque je ne savais rien faire d’autre, je suis devenu peintre ».
Bernard Lorjou rencontre Ducharne en 1925, ce qui l’autorise enfin à tutoyer les arts en coloriant les dessins des autres, développant ainsi son don inné de coloriste. C’est dans l’atelier de la rue Tourlaque un jour d’octobre 1927 qu’il rencontra celle qui deviendra sa femme, Yvonne Mottet. Lorjou est un anticonformiste, un provocateur, un écorché vif, mais aussi un être doué d’une sensibilité extrême. On retrouve ce qui le caractérise dans ses peintures qui nous renvoient de l’empathie à la colère parfois. Rares sont les œuvres qui transpirent autant l’artiste. Non, Lorjou n’est décidément pas un peintre ordinaire, artiste complet, il est doué d’un talent de dessinateur hors du commun et excelle comme coloriste ; il est de la même façon sculpteur, graveur et céramiste. Lorjou est le témoin de sa propre existence, du monde parfois violent qui l’entoure. Il nous livre ce monde en héritage au travers de ses œuvres qu’il pense et réalise sans filtre, quitte à froisser les quelques bonnes consciences de l’époque jusqu’au plus haut sommet de l’État. C’est aussi pour cela que Lorjou sera à jamais un artiste différent. Un jour de mai 1945, il a eu ces mots : « Voilà mon travail. Je n’ai rien à expliquer. D’autres le feront. Bien ou mal, je m’en moque. Regarde. Sinon demain tu devras aller le voir dans quelques musées étrangers ».
Bernard Lorjou quitte ce monde le 26 janvier 1986, peu de temps après sa dernière exposition Rock-Sida-Bâches, son dernier combat. Ce samedi 25 janvier prochain sera l’occasion de se rendre à la salle des ventes de Romorantin-Lanthenay où Maître Gwennaël Sentucq mettra aux enchères plusieurs œuvres de l’artiste dont plusieurs œuvres majeures comme ce portrait des parents de Bernard Lorjou qu’il réalisa en 1931 et reproduit dans le livre Lorjou par Junko Shibanuma.
Lithographies, dessins, huiles, techniques mixtes et collages se succéderont sous le feu des enchères.
Un voyage dans le temps de 1931 à 1985, où plusieurs périodes de l’artiste seront proposées : « les déportés 1937-1945 » « le miracle de Lourdes 1946-1948 » « L’age atomique 1949-1950 » « L’assassinat de Sharon Tate 1969-1970 »… En clôture de cette vente, deux exceptionnels et rares totems en céramique polychromes réalisés en 1967 par l’artiste à l’occasion du trophée du civisme, vous seront proposés et nul doute qu’il seront l’objet de toutes les convoitises. Rien ne saurait mieux définir Lorjou que Lorjou lui-même au travers ce message autographe destiné au catalogue de l’exposition posthume de Tokyo en 1986 : « Être artiste est la plus difficile des conditions, c’est être à la fois volcan terrifiant et fragile roseau ». Tout est dit.
Vente le 25 janvier à 14h. Visites tous les après-midi de 14h à 18h. Le jour de la vente de 10h à 12h.