Le Loir-et-Cher est considéré comme un département ultra-sinistré pour cette année 2021, surtout en arboriculture et en viticulture, et un peu partout, ailleurs, dans les autres secteurs.
Résultats : moins de fruits à consommer à table ou au petit déjeuner, et une production en vins très basse en hectolitres. La situation est plus que préoccupante et la Chambre d’Agriculture de Loir-et-Cher (CA 41), consciente des conséquences économiques importantes sur le plan financier, et donc de survie de certaines exploitations, a lancé des signaux d’alarme au cours d’une visite, sur le terrain à Mont-Près-Chambord. Arnaud Bessé, président de la CA 41 et plusieurs membres de son équipe ont expliqué au président du Conseil départemental Nicolas Perruchot que les pertes allaient dépasser, cette année, entre 60 et 70% en arboriculture et plus de 75% à l’hectare en viticulture, conséquences des trois nuits de gel successives, ce qui se solde par une perte d’exploitation, estimée provisoirement, en cette fin de mois de juin, à 1,5 million d’euros pour l’arboriculture et plus de 35 pour les vignobles…
3-4 tonnes de pommes au lieu de 150…
André Cellier, qui accueillait la délégation dans ses champs de pommiers et de poiriers, avec d’autres collègues, annonce «une catastrophe sans précédent, malgré les opérations de chauffage des rangées par des bougies géantes (350 par nuit à 8 euros l’unité!) et l’utilisation de l’éolienne/tour antigel, pas assez suffisante en chauffage pour combattre le mal…» «Contre 150 tonnes de pommes l’an dernier, on n’atteindra même pas trois à, quatre tonnes cette fois» renchérit Patrick Croiset, un voisin, arboriculteur aussi, tout aussi résigné qui ajoute que «certains fruits n’atteindront pas la taille minimum de maturité. Au prix de la main-d’œuvre, ce ne sera même pas la peine de ramasser les fruits et même si on en tire du jus, ce ne sera pas rentable…De plus, les consommateurs veulent des fruits parfaits extérieurement. Or, là il y aura de la tavelure et même si la chair sera aussi excellente à déguster, il y aura un frein à l’achat. Les gros acheteurs des centrales vont faire baisser les prix, ce qui ne les empêchera pas d’appliquer ensuite leurs marges et il y aura de la casse et, surtout, du gaspillage. Les cueilleurs qui viennent d’autres pays devront rester chez eux. Le cassis subira aussi la même crise avec moins de 3 tonnes possibles à la livraison alors que les commandes portaient sur une quinzaine…Et les acheteurs de ce produit iront vers d’autres régions moins touchées par les aléas climatiques». Dans les fruitiers comme dans la vigne, la taille des bois qui ont grossi car moins productifs et plus mouillés, sera augmenté de 40% en main-d’œuvre l’an prochain, d’où d’autres coûts, sans être sûrs pour autant de la production, si tout se passe bien. Il y aura un dérèglement notoire.
Appel lancé
Tous récemment installés, les jeunes Damien Croiset et Laurent Ducros craignent pour leur avenir respectif personnel, celui de leurs exploitations et de la cellule familiale puisque le conjoint-collaborateur se retrouve aussi en difficulté, l’entreprise ne pouvant se permettre de verser un salaire…, en cas de crise. Et si le chiffre d’affaires baisse ou flirte avec le zéro, il y aura autant de cotisations sociales en moins… Un appel est lancé aux banquiers, aux assureurs (pour ceux qui sont assurés, ce qui n’est pas encore généralisé et qu’il faudrait rendre obligatoire comme en Espagne) et aux collectivités. Nicolas Perruchot a annoncé l’ouverture d’une enveloppe de 1,5 million d’euros pour des aides aux modalités d’accès ultra-simplifiées…Son vote interviendra le 19 juillet prochain sans le président sortant… Toujours est-il que la première mesure d’urgence de 107 000 euros a été « insuffisante », précise Arnaud Bessé qui rappelle, au passage, que le Loir-et-Cher compte, encore, tout de même une bonne vingtaine d’arboriculteurs et plus de 400 viticulteurs, ces derniers ayant constaté, de plus, d’énormes dégâts dans les jeunes vignes récemment plantées pour redonner un coup de fouet aux vignobles vieillissants. Il est sûr qu’il n’y aura pas beaucoup de vacances prises cet été dans les familles du monde agricole…
Jules Zérizer