La démarche est engagée depuis fin 2012, les conseils généraux du Cher, de la Creuse, de la Nièvre et de l’Allier renforcent des actions communes telles la mutualisation de commandes publiques ou des échanges d’information sur l’enseignement supérieur, ou encore des politiques en faveur de la filière automobile… Mardi 14 septembre, à l’occasion d’un déjeuner avec la presse, Alain Rafesthain a expliqué que ce partenariat allait plus loin que la simple coopération locale. Les 4 départements entendent se faire les porte-paroles des départements ruraux auprès du gouvernement. Ils ne ca-chent plus mener ensemble un véritable lobby pour faire entendre la voix des territoires ruraux. Pour peser au niveau national, ils ont proposé à l’Assemblée des Départements de France (ADF), association qui regroupe tous les Conseils généraux, de leur confier une mission qui réalise des études sur la décentralisation ou l’aménagement du territoire. Le groupe constitué au sein de l’ADF compte désormais 20 conseils généraux.
De nombreux départements français ont gardé des caractères ruraux : moins peuplés, population plus importante vivant dans l’espace rural, majorité de maisons individuelles, proportion d’agriculteurs signi-
ficative. Leur densité de population est plus faible, le vieillissement de la population est marqué. Le tissu économique est plutôt composé d’entreprises de petite taille et la proportion de commerçants, artisans ou chefs d’entreprise est élevée. Les départements du Massif Central, mais également la Nièvre et le Berry présentent en commun certaines caractéristiques rurales très marquées.
Le premier enjeu auquel doivent faire face les départements ruraux d’après Alain Rafesthain, c’est celui de l’image, ils sont souvent regardés comme « ringards ». Pour autant, malgré cette image et même si le solde migratoire n’est pas toujours positif, le monde rural reste attractif et connaît de vraies évolutions ; le cadre de vie, proximité avec la nature, la sociabilité poussent des urbains à s’établir à la campagne et simultanément, les villes se transforment : à leurs frontières de plus en plus diffuses apparaissent des espaces périurbains, hybrides de ville et de campagne. C’est ce qu’Alain Rafesthain appelle les « nouvelles ruralités » et ce phénomène pose à ses yeux la question du comment on gère les services à ces populations. On habite de plus en plus en zone urbaine en travaillant en ville. Alain Rafesthain donne l’exemple du Cher où « la zone urbaine de Bourges rassemble 1/3 de la population et 2/3 des emplois ». De quoi interpeller puisque se pose la question du comment financer les services des 2/3 de la population qui vivent à la campagne alors que sur leur territoire ne seraient concentrés qu’un tiers des créations de richesses. « C’est encore plus compliqué que cela, explique Alain Rafesthain, s’il n’y avait qu’une différence entre le lieu de résidence de la population et les endroits où sont créées les richesses, on pourrait rétablir l’équilibre avec une péréquation. Mais aujourd’hui ce ne sont plus les entreprises qui sont sur votre territoire qui apportent les finances des collectivités. La dernière réforme nous a privé de notre potentiel fiscal, le dernier impôt qu’il nous reste c’est un morceau de la taxe foncière et ça ne représente plus que 15 % de nos ressources. En supprimant la taxe professionnel, l’Etat a privé les collectivités locales de leur autonomie budgétaire. » Le Président du conseil général ajoute : « Désormais, nous dépendons des dotations de l’Etat, le problème est que l’Etat nous confie des compétences et pas les finances pour les gérer. On nous impose des dépenses sans nous donner les moyens de les honorer. Pour le Cher, chaque année, il manque 25 millions d’euros. Le déficit cumulé est de 300 millions d’euros ! Le déficit est particulièrement lourd dans les départements ruraux ou les aides sociales et les aides à la dépendance constituent une part importante du budget ».
La question des finances semble essentielle pour l’avenir des départements ruraux « depuis janvier 2013, un grou-
pe de travail État/départements chargé de rechercher des solutions pour assurer un financement pérenne et durable des allocations de solidarité nationale travaille en concertation avec Matignon », précise Alain Rafesthain.
Quant à savoir pourquoi les quatre départements ne sont
pas associés dans cette démarche à l’Indre qui leur ressemble beaucoup, Alain Rafesthain répond « l’Indre est invitée, c’est elle qui ne veut pas venir. Ce n’est pas une question politique, l’Indre préfère travailler seule. Même lorsque nous faisons des groupements de commande publique, elle ne vient pas. Vous savez, même dans les périodes où l’Indre et le Cher ont eu la même couleur politique, il était difficile de les faire travailler ensemble. La seule vraie réussite de travail en commun entre l’Indre et le Cher, c’est le tourisme. Mais l’Indre reste invitée à se joindre à nous ».
Les 4 départements qui travaillent déjà ensemble se retrouvent dans un colloque à Vichy le 6 juin sur le thème « Campagnes, Le grand Pari ».
C.M