Le 11 juin est devenu la date référence de la zone d’Ozans. Une première pierre et trois signatures d’entreprises lèvent, un peu, le voile sur six années de démarches obscures. 

Autour de Tang Yun , le patron de Benjing Capital Land, les élus de la communauté d’agglo , du département , de la CCi et du conseil général ont maçonné l’avenir d’Ozans

Le terme de hub intégré va bientôt faire partie du vocabulaire berrichon. Tous les discours officiels prononcés le 11 juin au château d’Ozans  contenaient ce terme. Ce jour-là les Chinois devenaient puissance invitante pour présenter aux élus et aux responsables économiques du département un projet de développement fruit d’une gestation de six années.

Héritier de Jean-François Mayet, Gil Avérous, maire de Châteauroux et président de la communauté d’agglomération, était le premier bénéficiaire de cette officialisation de la présence chinoise à Ozans avec la pose de la première pierre du premier bâtiment construit sur la zone : un immeuble de service jouxtant le château qui accueillera, sur 4500m2  des centres administratifs et des centres de recherche et développement des entreprises chinoises désireuses de s’installer sur la zone. Cet immeuble sera opérationnel en janvier 2016.

Alors un hub intégré c’est quoi ? On connait surtout ce terme anglais en matière d’aviation, c’est une plateforme de correspondance pour les voyageurs. A Châteauroux la plateforme EuroSity, avec un S majuscule soulignant l’originalité de son aspect Sino Européen doit permettre aux entreprises chinoises de rapprocher leurs lieux de production et leur service après-vente  du vaste marché européen ( 350 millions de consommateurs). L’idée est également de développer des partenariats pour améliorer leur savoir faire et la qualité de leurs produits.

Pour les entreprises européennes EuroSity a l’ambition de leur permettre de conclure des partenariats commerciaux et de recherche et développement avec des entreprises chinoises  et de renforcer la promotion de leur savoir faire et leurs capacités d’exportation vers la Chine .

Economie , recherche et développement , éducation les trois cercles du logo d’EuroSity

«Un moment historique» , ont souligné tour à tour les orateurs français Gil Avérous, et chinois, le conseiller économique de l’ambassade de Chine rappelant que la France avait été la première à reconnaître le gouvernement chinois voici cinquante ans et la première, un demi siècle plus tard à accueillir la première plateforme sino européenne. Ironie de l’histoire le général De Gaulle auteur de la reconnaissance du gouvernement chinois est aussi celui qui a fait fermer la base américaine de la Martinerie sur laquelle vont s’installer les Chinois.

Le logo d’EuroSity comporte trois cercles  correspondant à ses trois vocations : l’économie, la recherche et de le développement et l’enseignement. Par delà le chantier du bâtiment qui va sortir de terre et la rénovation du château à destination hôtelière, le deuxième signe fort du démarrage du projet sera l’arrivée, en décembre des premiers étudiants chinois et européens dans la zone nord de l’ancienne base militaire.

Trois-cent-cinquante invités chinois et français ont assisté à l’événement historique, au premier rang desquels les pionniers du projet ; Louis Pinton , président du conseil général de l’Indre, Marie Madeleine Miallot, vice présidente du conseil régional, Paulette Picard, présidente de la CCI. Seul des participants de la première conférence de presse de l’automne 2008, le sénateur Mayet (en vacances aux Etats-Unis) manquait à l’appel. Gil Avérous lui a cependant rendu hommage «L’événement prouve que les démarches de Jean-François Mayet, contrairement à ce que sussuraient quelques esprits chagrins c’était du sérieux et du réel.»

Tong Yukia, directeur général de la SFECZ ( Sino France Economic Cooperation Zones) bras armé du groupe Benjing Capital Land dans l’Indre est désormais le grand maître de la zone d’Ozans. Il se donne quinze ans pour remplir les 450 ha mais se garde bien de s’engager sur le nombre d’emplois à créér. C’est pourtant bien le pemier souci des Berrichons.

Pierre Belsoeur

Les premières signatures

La pose de la première pierre d’EuroSity a été l’occasion de ratifier l’engagement de trois sociétés aux côtés de Benjing Capital Land.

photo Gil Averous  (à droite) face à M.Wu a plaidé la cause de la Berrichonne en présence de Michel Denisot,  Thierry Schöen et de Morald Chibout)

Ce fut d’abord au tour  du directeur général  de Huawei France, Song Kai de s’installer aux côtés de Wang Shouyu, président de SFECZ, pour signer un premier accord commercial. Huawei est une très grosse entreprise ( 140.000 collaborateurs propriétaires de leur entreprise par les biais de stock options) installée en France depuis 2003 spécialiste notamment des télécommunications avec la fourniture d’équipements de réseaux et créateur d’un smartphone haut de gamme. C’est Huawei qui s’occupera de l’équipement de la zone d’Ozans. Il implantera un centre de formation pour ceux qui sont amenés à utiliser ses équipements, ainsi qu’un centre de recherche.

Avec Sanei ascenseurs c’est un autre type d’accord. M.Wu son pdg sera bien un client d’EuroSity. Il installera son show-room sur la zone ainsi qu’un dépôt de pièces détachées pour alimenter ses clients européens. Bordé de Gabriel Perea, son directeur France , M. Wu n’est pas passé inaperçu. Sanei est en effet le partenaire maillots du stade de Reims et les dirigeants de la Berrichonne : Thierry Schoen, Michel Denisot et Molrad Chibout étaient venus les saluer après une première prise de contact parisienne, pour les entrainer  dans leur projet de développement du club avec pour objectif la montée en première division en 2018.

Troisième signature enfin, dans le domaine de la formation cette fois, avec l’organisme de formation Aformac chargé de mettre en place un cursus commun français, européen, chinois. HEI l’école d’ingénieurs de Lille, implantée depuis deux ans à Châteauroux a également été signataire d’un accord d’association avec EuroSity, indique le communiqué de la SFEZ. L’implantation du centre de formation sur l’ancienne zone nord de La Martinerie (en particulier dans les bâtiments de la cour d‘honneur) donnera lieu à des travaux qui débuteront en juillet, la livraison étant prévue pour la fin de l’année.

Les journalistes qui ont tenté de savoir combien d’emplois pourraient être générés par ces activités en ont été pour leurs frais. D’abord parce que les signataires des accords ne participaient pas au point presse qui suivit la pose de la première pierre, mais aussi parce que dans ce domaine les Chinois restent très discrets. Et allez donc arracher une indiscrétion de quelqu’un dont vous ne parlez pas la langue…

Un chantier modèle sur Ozans

Le conseil général et la communauté d’agglomération de Châteauroux ont investi, bien avant les Chinois, dans un projet de Haute Qualité Environnementale.

On se sent tout petit auprès d’un scrappeur

Vous avez déjà essayé de vous mesurer à une roue de scrappeur. Même lorsqu’on mesure  un mètre quatre-vingts on se sent tout petit à côté des cinq monstres jaunes qui ont attaqué depuis plusieurs semaines les terrassements d’Ozans. 50 hectares sont actuellement en cours d’aménagement pour le compte de la communauté d’agglo de Châteauroux. Il seront ensuite commercialisés par Benjing Capital Land via la SFECZ aux entreprises, chinoises ou non qui choisiront de s’installer sur EuroSity.

HQE les machines de Christian Bodin, le directeur de la Setec, une société du groupe bourguignon Roger Martin, installée en voisine sur le site de la Martinerie? Sans doute pas compte tenu de leur consommation à l’heure de travail. Tellement voraces qu’on utilise d’énormes bulldozers pour les déplacer lorsque leur mission n’est pas de racler le sol.

Non, ce qui fait d’Ozans un chantier exemplaire c’est que tout a été conçu pour qu’aucun matériau ne sorte du site et que l’on ait le moins possible d’apports extérieurs. La terre végétale a bien évidemment été mise de côté. Les ouvriers de la SETEC exploitent des gravières locales pour réaliser les soubassements de chaussées. L’argile trouvé sur place servira au colmatage des bassins de rétention alimentés par un réseau spectaculaire de canalisations. Un réseau qui passera souvent sous les circulations douces qui quadrilleront la zone. Car il ne s’agit pas de faire d’Ozans une simple zone industrielle, comme l’a rappelé Gil Avérous, mais d’un endroit avec des chemins sur lesquels on pourra se promener à pied ou à bicyclette. On longera notamment les fameux bassins de rétention au fond desquels une couche de terre végétale permettra à une végétation aquatique d’épurer l’eau.

En attendant les ouvriers procèdent à un tri sélectif particulièrement sévère à proximité de leur base de vie, mesurent toutes leurs consommations (eau, carburants, électricité) car le label HQE les oblige à respecter un cahier des charges extrêmement précis et très contrôlé. Une accumulation de contraintes? « Non, assure, Christian Bodin, une autre façon de travailler, et une référence pour l’avenir.» Un avenir que le chef d’entreprise espère riche de commandes privées qui illustreront la réussite économique d’Ozans.

P.B.