Les temps sont durs pour les rêveurs, par Émilie Rencien


« Savoir, penser, rêver. Tout est là ». Cette citation signée Victor Hugo revêt une saveur particulière ce mois d’octobre 2023. Comme une sorte de mantra. Cette prose aura croisé notre route de lecture, tel un signe rêveur, seulement quelques journées avant un attentat meurtrier dans le lycée d’Arras et la convention dans le Loiret, des Intercommunalités de France, à Orléans où la Première ministre, Élisabeth Borne, n’aura finalement jamais posé un pied, obligée de rebrousser chemin du fait d’un contexte international puis national tourmenté. L’annonce du demi-tour aura été effectuée un vendredi 13 (octobre) bien singulier, en vidéo, en temps réel et en direct sur les réseaux sociaux, par Sébastien Martin, président de la fédération nationale des métropoles, agglomérations, communautés urbaines et communautés de communes précitée. Quelques jours également avant une information passée un peu inaperçue, à savoir la triste découverte du corps sans vie du comédien Marwan Berreni (connu notamment pour son rôle d’Abdel dans la série de France 3, « Plus belle la Vie », aujourd’hui relancée par TF1), près de Mâcon, en Bourgogne-Franche-Comté. Un garçon nature, souriant et adorable, que nous avions rencontré à Vendôme et Blois, dans le Loir-et-Cher, en 2013 et 2016 si notre mémoire est bonne, lorsqu’il avait participé à un roman-photo d’un nouveau genre littéraire et d’une qualité esthétique également nouvelle, entre BD, photographie et cinéma sur papier, « Le secret des trois Clés », imaginé par Antoine Besson (qui se fait appeler Anthony Darène désormais), avec le photographe Claude Defresnes, pour raconter une histoire autour du magicien Jean-Eugène Robert-Houdin.

Un automne 2023 donc, sonnant comme une espèce de « Jimla » lunaire, cachée dans une citrouille, ou sortie d’un roman d’horreur de Stephen King, hurlant que le passé, obstiné face au changement, s’harmonise avec le présent. Alors, « savoir, penser, rêver. Tout est là », ou un phare à suivre dans le noir. Les âmes romantiques s’en contenteront possiblement, mais comment manier le “Carpe Diem” et éviter d’être sans cesse en PLS ? Même le Ministère de l’intérieur pédale dans la semoule étouffante. Pendant la pandémie Covid-19 et les confinements associés, nombreux(ses) furent à rêver d’un monde d’après, c’est-à-dire une société meilleure qui avait, enfermée, put réfléchir sur l’essentiel. Des rêveurs(ses)… Mais la boîte de Pandore a été maintenue fermée un moment seulement, celui du calme apparent qui précède toujours une tempête. Mais c’était sans compter sans un lot de nouveautés enfantées avec ce virus entravant. Le télétravail est ainsi devenu une norme normale au travail, grignotant la convivialité existante auparavant entre collègues. Un petit arbre qui cache cette forêt : l’amour du prochain, tant escomptée suite à une expérience collective de contraintes sanitaires qui aurait pu être imaginée liante, a en définitive été supplantée; la peur de l’autre revient, tend à prédominer trois ans après. D’après le maître japonais Dögen, fondateur du zen,« Une fleur tombe, bien que l’aimions ; et la mauvaise herbe pousse, bien que nous la détestions.»

Alors, « Savoir, penser, rêver. Tout est là ». La liberté de pensée, et d’écrire ici, dans ce billet et ces colonnes, avec un brin d’impertinence mais aussi esprit et curiosité, sexy et compétence, peut être un des antidotes, nous confiait l’une de nos connaissances issue de la haute fonction publique. Le portugais Bobi, le chien le plus vieux du monde qui n’aura jamais été tenu en laisse, a bien vécu. La popstar US de notre adolescence, Britney Spears, qui a débuté à 11 ans au “Mickey Mouse Club” avec l’autre pop icône, Christina Aguilera, ose à 41 ans un exercice “sans Dieux ni maîtres” via son livre-autobiographie évènement, “la Femme en moi”, et c’est déjà un carton. Si ces temps s’avèrent durs pour les rêveurs et les princesses, certains exemples parviennent à les édulcorer. Comme un air d’insouciance pas si surannée. Juste en pause. Comme des cycles, ceux d’une humanité dite adamique. La pomme, puis le serpent. Avant le péché, et le replay. L’époque est malaisante… mais heureusement, n’interdit aucunement aux extravagant(e)s de rêver encore, allelulia !