Un sage vous dirait qu’il « ne faut pas confondre tourner autour et marcher dedans ». Un autre que Confucius et confusion, ce n’est pas vraiment la même. Soyons clairs !
Si je vous dis raté. C’est que vous n’avez pas atteint l’objectif. Si je vous dis impôt. C’est que l’on prélève. Si je vous dis pénurie. C’est qu’il y a un manque quelque part. Si je vous dis inscription d’un droit dans la Constitution. C’est que ce n’est pas gravé dans le marbre. Un mot pour un autre qui veut dire la même chose, c’est un synonyme. Un mot pour un autre qui veut masquer l’inverse, c’est de la politique.
Les exemples ne manquent pas en ces temps bénis où les prétendants au trône du royaume des faux-culs sont légion. On a not’Manu, qui n’est pas un imbécile puisqu’il est président de la République. On a Bruno qui n’est pas un imbécile puisqu’il est ministre de l’économie et des finances. On a Olivier qui n’est pas un imbécile puisqu’il est ministre délégué chargé du renouveau démocratique et porte-parole du gouvernement. Nos élites ont ainsi tendance, ces temps-ci, à se la jouer René Magritte, voir Marcel Duchamp. Le « ceci n’est pas une pipe » est devenu leur credo. « Ceci est une fontaine » en est un autre très ressemblant. Ils sont plusieurs à faire du happening politique dans cette nouvelle philosophie. Par contre, on a les sénateurs, dans leur ensemble, qui ne sont pas des imbéciles puisqu’ils sont sénateurs. D’autres, comme eux, semblent avoir retrouvé le sens des mots, non pas pour le bien de tous, seulement pour les vider de leur substance.
Le premier, par exemple, est persuadé que quand « ce n’est pas un échec », c’est que « ça n’a pas marché ». Les fans de Kaamelott vous lanceraient avec juste raison : « C’est pas faux ». Le second est persuadé que le prélèvement décidé par l’Allemagne sur les entreprises ultra-bénéficiaires, « ce n’est pas une taxe, c’est une contribution obligatoire ». C’est pas faux, on vous dit. Le troisième est persuadé que « il n’y a pas de pénurie au global, on n’est pas en train de manquer de carburants, on n’est pas en difficulté d’approvisionnement… ». Ben c’est pas faux non plus ! La preuve « on est dans des difficultés temporaires de distribution liées à un mouvement social… » C’est toujours pas faux. Quant au cénacle de vieux barbeaux ronds-de-cuir installés au palais du Luxembourg pour terminer tranquilles leur carrière, ils sont formels : ce sont eux qui décident. Même pour des histoires de gonzesses ! Précisons ici que le sénateur est par nature un gonze largement assez âgé pour n’avoir que faire des contraintes grammaticales sexistes. De fait, gonzesse n’en devient pas pour autant péjoratif. Ça passe crème ! De plus, comme les sénatrices ne sont que portion congrue en cette sénile assemblée, circulez y a rien à voir. La commission des lois du Sénat vient donc d’estimer que le droit à l’IVG et à la contraception n’avait pas à être inscrit dans la Constitution. Ce « n’est pas justifiée par la situation rencontrée dans notre pays » a précisé la commission. Le sénateur de Vendée, évêque non-consacré, Chouan de naissance de cœur et d’église, mon préféré des sénateurs LR, Bruno Retailleau a abondé dans ce sens. On en attendait pas moins de quelqu’un qui considère le clissonais festival Hellfest comme une œuvre satanique et trop prosélytique en faveur du Diable. Pour cette docte assemblée, il n’est pas besoin de protéger une loi importante pour les femmes en général. Si d’autres pays n’avaient pas fait marche arrière, comme les États-Unis , on pourrait s’inquiéter mais là …
L’interprétation, c’est ce qui permet aussi de se faire mousser. Dans ce contexte, on se retrouve avec mon préféré des députés LR, Éric Ciotti, élu Alpes-Maritimes, caporal-chef manqué des conscrits de la 85/10, qui veut une nouvelle loi sur les vêtements religieux à l’école. Aussi pointu dans le maniement du fusil Lebel que dans la connaissance des textes législatifs en vigueur, il en oublie la loi de 2004 qui interdit déjà « les signes et vêtements visant à manifester de manière ostensible une appartenance religieuse.. »
La laïcité, comment dire, c’est comme cela que ça s’appelle !
Fabrice Simoes