Entre Tamise et Covent Garden, au Novello Theatre de Londres, on se prépare à accueillir, dans les prochaines semaines, encore plus de monde qu’à l’accoutumée. C’est que, sous les ors de ce théâtre désormais plus que centenaire, Mamma Mia, la comédie musicale qui est dans la lignée de Cats en terme de rentabilité, est à l’affiche depuis 2012. Et l’annonce du nouvel album d’ABBA va certainement booster les ventes de billets. La sortie d’un opus supplémentaire, avec des clips vidéos d’Agnetha, Anni-Frid, Benny et Björn en presque vrai, a fait le buzz. On vous dira que ce n’est pas une question d’argent, juste un geste d’amour vers les fans.
Entre cap Lévi et cap de la Hague, sur les quais du chantier naval de Cherbourg, on se prépare à voir repartir la petite colonie australienne installée là depuis 5 ans. C’est que les familles, pour la plupart issues de la région d’Adélaïde, avaient pris leurs marques dans le Cotentin. Les 12 sous-marins qui devaient être construits, pour partie, dans l’Hexagone ne le seront pas. Dans l’affaire, Naval Group vient de perdre 54 milliards et la ville de Cherbourg bientôt 200 habitants d’un coup. On vous dira que ce n’est pas une question d’argent, juste un problème d’attachement au Commonwealth.
Entre Sauk River et Molonglo River, dans les appartements des ambassades de Washington et Canberra, on se prépare à faire des bagages. À Paris, dans les couloirs du Ministère des affaires étrangères, au quai d’Orsay, on est prêt pour s’entretenir sur le sujet des sous-marins, avec les ambassadeurs de France aux USA et en Australie. Pas content, le ministre de tutelle, Jean-Yves Le Drian, veut faire connaître son courroux. Catherine Colonna, l’ambassadrice au Royaume Uni – le troisième protagoniste de la crise sous-maritime- basée à Londres, n’a, quant à elle, pas été rappelée. Elle s’occupe des problèmes de Brexit, et ce n’est déjà pas une mince affaire. On vous dira que ce n’est pas une question d’argent, juste un souci de compréhension avec Boris Johnson, décidément jugé peu fréquentable.
Entre Marne et Volga, dans les chais de champagne et à la Douma, on se prépare à laisser inscrire l’appellation Champagne sur les piquettes favorites de Vladimir Poutine. Pour ne pas avoir à passer par la vente à emporter, les maisons françaises les plus prestigieuses préfèrent la jouer carpette. Tout ça pour ne pas perdre les marchés russes les plus juteux, même sous étiquette de vins pétillants français. On vous dira que ce n’est pas une histoire d’argent, juste un problème de modélisation du marché.
Entre Zemmour et Macron, dans les studios du Grand Jury RTL/LCI/Le Figaro, d’habitude la langue de bois est d’usage. Là, on n’est pas toujours préparé à entendre, des avis très tranchés. On va devoir s’habituer. “Je voterais Éric Zemmour, très clairement”, a assuré l’exempté de service militaire, spécialiste de l’armement laissé aux mains des talibans, Éric Ciotti. Le député des Alpes Maritimes a ajouté qu’Éric Zemmour « défend aujourd’hui des idées que pour la plupart je partage ». Voilà qui est net. Ce n’est pas une histoire d’argent, juste l’expression de valeurs jamais vraiment perdues de vue.
Entre Trump et Biden, dans les États-Unis de maintenant, on s’était préparé à du changement tant sur le fond que sur la méthode. Après l’évacuation de l’Afghanistan négociée par le premier, réalisée à l’arrache par l’autre, on pouvait avoir des doutes. Dans les milieux diplomatiques français, on estime officiellement que la seule différence entre les deux présidents, c’est la capacité du second à ne pas savoir twitter. On vous dira que ce n’est pas une question d’argent, juste une maîtrise délicate des androïdes pour les vétérans du Vietnam.
Entre les uns et les autres, on vous dira que, la consommation, les modes de vie, le climat, tout ça, on vous dira que ce n’est pas une histoire d’argent, juste … enfin, si, un peu quand même !
Fabrice Simoes