La Loire coule dans leurs veines


Muides-sur-Loire

Le pêcheur Sylvain Arnoult a décroché, avec son épouse Julie, un « talent gourmand » à Montlivault jeudi 9 mars lors d’un concours mené par le Crédit Agricole Val de France et le guide du Bottin Gourmand. Ce fut l’occasion pour le couple de faire (re)découvrir un métier souvent méconnu et oublié.

À l’heure où le géant américain du e-commerce Amazon a ouvert son premier magasin automatisé à Seattle, il semble presque désuet de parler du régime du chasseur-cueilleur. Et pourtant, les robots ne remplaceront jamais totalement la main de l’Homme. Sylvain Arnoult peut en attester, les bottes solidement ancrées sur le plancher de son embarcation flottante, les mains dans l’eau de la Loire pour récupérer ses filets tendus la veille, sous l’œil attentif de son épagneul breton. « J’ai appris à faire du bateau avant d’avoir mon permis de conduire ! Ce goût pour la pêche se transmet depuis longtemps dans ma famille, » raconte-t-il. « Mon grand-père, mon père, l’oncle de ma mère, les cousins… J’ai baigné dans ce univers très jeune et ça vaut 1.000 formations. » Le pêcheur professionnel de 36 ans a par conséquent, naturellement, repris à son tour la ligne, après avoir exercé le métier de récupérateur de métaux auparavant. Depuis cinq ans, avec sa compagne Julie âgée de
32 ans, il apprécie ses escapades ligériennes en dépit d’un lever avant le soleil, d‘horaires à rallonge et d’un fleuve parfois capricieux. Le tandem, qui se définit comme artisan conservateur, imprime sa patte, celle d’une pêche durable, respectueuse de l’environnement et des ressources. « Les anciens n’ont pas forcément su faire, alors la nouvelle génération doit donner l’exemple. Sur les 15 kilomètres de Loire que nous exploitons, nous respectons la nature et ses cycles que nous ne maîtrisons pas. Le climat peut en plus favoriser des espèces plus que d’autres. Il y a par exemple beaucoup plus de lamproies qu’il y a 30 ans.  Nous, nous utilisons des mailles de 60 mm pour laisser passer les juvéniles et nous prélevons les poissons à chair blanche qui sont en abondance en Loire moyenne. C’est-à-dire que 80 % de notre activité de pêche est basée sur le mulet et les cyprinidés. Brêmes, barbillons, aspes, chevesnes, carpes, gardons… Également silures, aloses, anguilles et carnassiers selon les saisons, etc. Nous pêchons entre 3,5 et 5 tonnes par an, nous pourrions faire davantage mais pourquoi ? Il faut réfléchir un peu ! Le comportement de certains nuise à toute la profession ; le consommateur a aussi son rôle. C’est une question de bon sens, finalement, tout simplement. Notre credo, c’est la qualité, pas la quantité. »

Une autre maille au filet

Sylvain et Julie Arnoult pêchent donc, et bien plus. Pour compléter leur activité ligérienne et la rendra économiquement viable, ce duo d’eau douce à ville comme sur le bateau concocte de A à Z, sans intermédiaire, depuis six mois des terrines à la texture raffinée grâce à d’importants investissements réalisés, consacrés à l’acquisition de matériel (autoclave, chambre froide, surgélateur, etc.) et à la création s’un laboratoire de 80 m² qu’ils ont installé dans le sous-sol leur domicile, à Muides. Huit recettes poissonneuses, nature ou agrémentée (tomate séchée, basilic, estragon, safran, whisky, etc.), sont actuellement disponibles. Le duo développe la fumaison également ainsi que les soupes. En résumé, le poisson de Loire saute dans l’assiette en empruntant un circuit court… Et surtout, une chose frappe chez les Arnoult : la passion est bel et bien chevillée au corps et n’es pas prête à s’envoler au gré du courant. « Il y a des jours où ça ne se passe pas comme vous le souhaitez, vous ne pêchez rien, vous êtes trempé… » narre encore Sylvain Arnoult. « Et le lendemain, tout repart et le fleuve vous offre un cadeau ! Pour exercer cette profession, il faut l’aimer car ce n’est pas facile tous les jours. Mais moi, j’en rêvais depuis mes 17 ans, l’année où j’ai effectué ma première demande. Ce souhait s’est enfin concrétisé en 2012, des lots de pêche s’étant libérés. » Il tient à ajouter. « Nous tenons à rester des artisans, nous ne voulons pas être des industriels. Nous nous battons pour continuer à défendre ces valeurs. Pêcheur, c’est un vrai métier !»

Émilie Rencien

Arnoult, pêcheur de Loire, 6 rue des Boulats, 41500 Muides-sur-Loire. Vente de poissons frais ou fumés, de terrines et de soupes.
La boutique est ouverte chaque vendredi de 17h30 à 19h et le samedi de 9h à 12h30.
Les poissons de Sylvain Arnoult figurent aussi à la carte des restaurants de Christophe Hay à Montlivault et les terrines  sont notamment dans la vitrine  de France Terroir, à Blois.


Plus d’informations :
06 78 43 44 33 et 06 49 60 05 14, www.arnoult-pecheur-de-loire.com