Le dernier hommage à Jean-Paul Grossin


Rarement l’église d’Autainville, dans la Beauce profonde, commune natale de Jean-Paul Grossin, n’aura connu une telle affluence, comme pour le dernier hommage qui lui a été rendu, en ce même édifice où il fut enfant de chœur.

Gens de presse ; amoureux de la nature, des plaines, des lacs, des étangs et des forêts ; chasseurs ou non ; rabatteurs ou simples amateurs de suivis de chasses ; fans de brames et d’automnes embrumées ; amis des temps anciens ou nouveaux ; paysans du Nord et du Sud de la Loire…Tous unis dans un même chagrin ont accompagné la famille du cinéaste animalier-journaliste solognot pour un ultime au revoir à celui qui fit de sa vie une passion et une passion de sa vie.

Des hommages sobres, pleins de vérités non feintes ou cachées (J-P.G. n’aurait ni aimé, ni apprécié…), ont rappelé ses années de veilles, d’affûts et d’observations toutes empreintes du même sujet : le cerf… dont il magnifia la vie, sujet trop rapidement traité par d’autres chasseurs d’images et de sons.

Une consœur de France3 Centre-Val de Loire nous avait expliqué que J-P.G., un peu comme les indiens du Far West l’avaient fait avec les bisons, n’était plus homme. « Au fil des décennies et à force de les fréquenter, Jean-Paul Grossin était devenu cerf. Il pensait cerf, parlait cerf et, un peu retiré du monde humain, il vivait en Sologne comme son modèle, au fil des saisons, loin des bruits et rumeurs de la ville ».

Avant de se quitter, une fois les derniers hommages rendus, les discussions allèrent bon train dans la salle paroissiale d’Autainville où des sons émis par de cerfs plus chauds que la braise se mêlaient aux chansons que Jean-Paul Grossin adorait, autour d’un buffet qui ressemblait à ceux dressés à un retour de chasse, une pêche d’étang, un panneautage. Rustiques à souhait, les cochonnailles rappelaient la joie de vivre de celui que la grande faucheuse venait de cueillir dans sa 61ème année. Dans un coin de la pièce, s’entassaient des dizaines de mues de bois de cerfs de tous âges qu’il avait collectés tout au long de sa vie de coureur des bois et de chasseur d’images.

Invité(e) à en emporter en souvenir par la famille, chacun(e) repartit dans les rues d’Autainville avec son trophée à la main… Un étranger de passage, dans ce coin sympathique de Beauce où il se serait perdu, aurait
pu penser, en voyant cet étrange défilé, que l’assem-
blée générale de l’amicale des cocu(e)s du département venait de prendre fin…

Et si c’était, là, le dernier gag de Jean-Paul Grossin envers tous ses amis, ses copains, de Castor à Pollux…, il a dû bien en rire, de là-haut, près de Cabu, Desproges, Brassens, et bien d’autres gais lurons bien trop tôt rejoints au paradis, au purgatoire, ou en enfer !

Richard Ode