Un 30e anniversaire contrarié, et c’est peu de l’écrire. Entre annulations et rendez-vous décalés, le prix littéraire blésois s’adapte ans le Loir-et-Cher à l’actualité sanitaire pour tenter de souffler ses bougies. Petit résumé des décisions actées.
Le 12 juin prochain, il n’y aura pas de rencontre littéraire avec les auteurs de la sélection 2020, pas de remise de prix, ni de cocktail avec les jurés et amateurs de littérature. Tous les auteurs sélectionnés avaient répondu positivement à l’invitation de participer à la rencontre, tout comme Carole Martinez, invitée spéciale des 30 ans. Le prix Emmanuel Roblès sera effectivement remis, mais en septembre, selon des modalités qui ne peuvent actuellement être précisées, chacun ignorant la suite du contexte sanitaire. Les jurés seront invités à exprimer leur vote, selon des modalités pratiques qui leur seront indiquées dès que possible. Reporter le vote à septembre leur permettra aussi de disposer d’un temps de lecture, et peut-être d’échanges redevenus possibles, pour ne pas perdre toute la saveur du Roblès. La possibilité de rencontrer les auteurs n’est pas écartée, mais dépendra du contexte des mois à venir.
Un agenda bouleversé
Pour cette occasion, le public avait élu son auteur favori, parmi tous les sélectionnés depuis le début du prix, et le choix s’était porté sur Carole Martinez, lauréate en 2007 pour Le coeur cousu (Gallimard). Pour cette circonstance, en plus de la tradionnelle journée du vendredi, un rendez-vous avait été prévu le samedi pour des ateliers d’écriture avec Carole Martinez et Carole Zalberg. Ils ne pourront pas non plus avoir lieu en juin. L’intérêt vif du public pour cette pratique avec des auteurs conduira les bibliothèques à proposer des ateliers de cette nature dès que possible. Également, ordinairement, le prix débute par une conférence très suivie, proposée aux jurés, et à tous les amateurs de littérature. C’est l’occasion d’un temps de réflexion, voire d’apprentissage, en matière de vie ou critique littéraire. Outre son intérêt intrinsèque, cette conférence permet aux jurés d’étayer leurs lectures par un recul théorique. Les bibliothèques veillent à inviter des personnalités réputées du monde universitaire ou littéraire, qui soient par ailleurs disposées à s’adresser à un public d’amateurs fortement motivés. C’était le cas cette année avec Laurent Demanze, professeur à l’Université de Grenoble-Alpes, dont l’intérêt porté à la place faite à l’investigation du réel par les auteurs contemporains, notamment dans son étude Le nouvel âge de l’enquête parue chez Corti en 2019, possède un écho très fort avec de nombreux premiers romans. On trouve d’ailleurs un auteur sélectionné pour le Roblès 2015, Pierre- Yves Leprince, parmi ceux qu’il étudie dans ce texte. C’est une occasion manquée à laquelle il faudra tenter de remédier.
Une convivialité contrariée
La sélection à peine annoncée depuis quelques jours, le 10 mars, le confinement décrété le samedi 14 au soir, a conduit à la fermeture des librairies. Il a pu être difficile à nombre de jurés de se procurer les 5 titres de la sélection 2020. Les bibliothèques d’Agglopolys ont acquis, pour compenser, un nombre important d’exemplaires numériques. Un titre, Trois jours à Berlin, n’existe toutefois pas sous ce format. Pour les quatre autres, les bibliothèques offrent : 11 exemplaires d’Impasse verlaine, 5 de À la ligne, 3 de Protocole gouvernante, 3 de Ougarit. Cet apparent déséquilibre vise au contraire à équilibrer la disponibilité des textes à emprunter numériquement. On sait en effet que si tout est parfaitement légal, en revanche, rien n’est normalisé en matière de prêts numériques proposés par les bibliothèques. Ainsi, chaque éditeur décide, outre du prix et de la durée de validité pour la bibliothèque du fichier numérique, du nombre de prêts simultanés ainsi que du nombre de prêts totaux qu’il autorise pour un exemplaire. Sur cette base, 113 prêts numériques sur les 4 titres sont actuellement enregistrés, par 106 lecteurs différents. Et bien sûr, la lecture numérique divise, certains l’ont adoptée, d’autres y sont réfractaires, et l’on peut aussi s’y résoudre faute de mieux. Le retour d’expérience des jurés à cet égard sera intéressant. Par ailleurs, des livres imprimés plus nombreux ont aussi été acquis par les bibliothèques d’Agglopolys, et ils seront proposés aux comités après le terme du confinement. Vous l’aurez compris, « Restez chez vous » et « Soyez jurés Roblès » sont presque des injonctions contradictoires tant la convivialité et les échanges au sein des comités sont essentiels à l’identité et à l’intérêt humain du Prix Roblès. Les jurés de ce Roblès 2020 auront beaucoup à raconter sur la manière dont ils ont pu organiser malgré tout leurs échanges, lettres, courriels, visioconférences, échanges téléphoniques… mais les nourritures terrestres qui accompagnent souvent les rencontres auront manqué dans tous les cas. Bien sûr, pas de réunions des comités non plus, elles rassemblent chaque fois environ 150 personnes !
Dépit et espoir mêlés
Qui sait ce que l’absence de ce large échange aura comme effet sur les votes. On entend souvent les jurés qui y prennent part dire qu’ils ont pu ainsi découvrir d’autres points de vue et parfois, ainsi, réviser le leur. Une petite compensation est proposée sur le site des bibliothèques d’Agglopolys, dans les pages dédiées au Prix Roblès, où sont en ligne des revues de presse et entretiens vidéo avec les auteurs, sous la rubrique « Le Roblès continue autrement » : https://bibliotheques.agglopolys.fr/EXPLOITATION/ ROBLES/le-robles-continue-autrement.aspx. Le report en septembre de la remise du Roblès a enfin un avantage : de nouveaux comités peuvent encore se former et s’inscrire jusqu’à la fin juin ! Rendez-vous pour ce faire sur le site https://bibliotheques.agglopolys.fr.
AMMOUN, Camille, Ougarit, Inculte
FARAH, Dalie, Impasse Verlaine, Grasset
LAVENANT, Guillaume, Protocole gouvernante, Rivages
MAZIÈRES, Christine de, Trois jours à Berlin, Sabine Wespieser
PONTHUS, Joseph, À la ligne : feuillets d’usine, La Table ronde